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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

J’aurai l’honneur de vous transmettre tous les renseignements que je recueillerai.

« Il est probable que la mort du pape et la chute du cardinal Bernetti vont réjouir les ennemis des ordonnances[1] ; ils proclameront cet événement malheureux une punition du ciel. Il est aisé déjà de lire cette pensée sur quelques visages français à Rome.

« Je regrette doublement le pape ; j’avais eu le bonheur de gagner sa confiance : les préjugés que l’on avait pris soin de faire naître contre moi dans son esprit, avant mon arrivée, s’étaient dissipés, et il me faisait l’honneur de témoigner hautement et publiquement, en toute occasion, l’estime qu’il voulait bien me porter.

« Maintenant, monsieur le comte, permettez-moi d’entrer dans l’explication de quelques faits.

« J’étais ministre des affaires étrangères à l’époque de la mort de Pie VII. Vous trouverez dans les cartons du ministère, si vous jugez à propos d’en prendre connaissance, la suite de mes relations avec M. le duc de Laval. L’usage est, à la mort d’un pape, d’envoyer un ambassadeur extraordinaire, ou d’accréditer l’ambassadeur résidant par de nouvelles lettres auprès du Sacré Collège. C’est ce dernier parti que je proposai de suivre à feu S. M. Louis XVIII. Le roi ordonnera ce qu’il croira de meilleur pour son service. Quatre cardinaux français vinrent à Rome pour l’élection de Léon XII. La France en compte aujourd’hui cinq ; c’est certainement un nombre de voix qui n’est pas à dédaigner dans le

  1. Il s’agit toujours des ordonnances du 16 juin 1828.