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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

faut, disait madame de Farcy, que nous soyons toutes à Dieu. Ce jour qui m’éclaire, cette terre qui fournit à tous mes besoins, ces plaisirs qui me délassent, ces parents, ces amis que j’aime, leur tendresse, le plus doux des biens, tout cela me vient de lui ; mes yeux ne peuvent reposer que sur ses bienfaits.

« Si le moment de vous présenter au tribunal arrive avant que vous sentiez que la grâce vous est accordée, allez, sans hésiter et avec confiance, aux pieds de Dieu, qui ne vous demande que la droiture et la bonne volonté ; c’est lui qui fera le reste.

« Jamais, nous dit la nouvelle amie de Julie, je n’eus de si doux moments que ceux où je me sentis pressée dans les bras de cette incomparable amie : il semblait qu’elle en voulût faire une chaîne pour m’attacher à Dieu. »

Madame de Farcy parlait de Dieu d’une manière simple, naturelle et pourtant élevée, et son ton de voix et sa physionomie prenaient alors un caractère attendrissant et même sublime.

« Lorsque j’eus le bonheur de la connaître, nous raconte une de ses autres amies, j’avais la tête farcie de chimères romanesques dont je m’étais alimentée toute ma vie.  . . . . . . . . . . Je me souviens qu’à l’occasion de sentiments exaltés après lesquels je courais beaucoup, elle me dit : Vous n’aimerez jamais comme vous voudriez aimer, à moins que vous ne vous tourniez vers Dieu.  . . . À l’égard de créatures .  .  .  .  .  .  .  .   vous ne serez jamais contente ni d’elles, ni de vos sentiments. Vous serez tendre aujourd’hui, froide de-