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Page:Chateaubriand - Vie de Rancé, 2è édition, 1844.djvu/129

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LIVRE DEUXIÈME

vers avaient à l’envi réalisé les merveilles. La nature, qui ne vieillit jamais, s’empare peu à peu de ces somptueuses villas, œuvres altières de l’homme et fragiles comme lui. Nous avons vu des colombes nicher sur des corniches d’une salle peinte par Raphaël, le câprier sauvage enfoncer ses racines entre les marbres déjoints, et le lichen les recouvrir de ses larges plaques vertes et blanches. »

De Bologne à Florence, Rancé, sur une route triste dans les Apennins, fut renversé à terre de son cheval par le vent. À Florence, le pèlerin ne s’enquit point de Dante et de Michel-Ange : quand, à mon tour, j’ai cheminé parmi ces débris, j’étais interdit. Rancé reçut les honneurs de la duchesse de Toscane. On regrette qu’il ne se soit pas arrêté plus loin au vallon d’Égérie : il aurait pu mener des Lemures saluer Néère et Hostia là où tant de femmes avaient passé. Enfin il entra dans la ville des saints apôtres. Ô Rome, te voilà donc encore ! Est-ce ta dernière apparition ? Malheur à l’âge pour qui la nature à perdu ses félicités ! Des pays enchantés où rien ne vous attend sont arides : quelles aimables ombres verrais-je dans les temps à venir ? Fi ! des nuages qui volent sur une tête blanchie !