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LIVRE DEUXIÈME

Tamise, voir entrer au port des vaisseaux chargés des richesses du monde, admirer les maisons de campagne de Richmond, nous si pauvres, nous privés du toit paternel ! Toutes ces choses étaient de véritables félicités. Reviendrez-vous, félicités de ma misère ? Ah ! ressuscitez, compagnons de mon exil, camarades de la couche de paille, me voici revenu ! Rendons-nous encore dans les petits jardins d’une taverne dédaignée pour boire une tasse de mauvais thé en parlant de notre pays : mais je n’aperçois personne ; je suis resté seul.

Rancé va quitter Chambor, il faut donc que je quitte aussi cet asile où je crains de m’être trop oublié. Je vais retrouver la Loire non loin du parc abandonné ; elle ne voit point la désolation de ses bords : les fleuves ne s’embarrassent point de leurs rives. Ne demandez pas à la Loire le nom des Guise, dont elle a pourtant roulé les cendres. À cent cinquante lieues d’ici, je rencontrai, il y a huit mois, en terre étrangère, près du jeune orphelin, M. le duc de Lévis, qui remonte au compagnon de Simon de Montfort. Mirepoix était maréchal de la Foi, titre qui semble avoir passé à son dernier neveu. J’ai retrouvé aussi madame la duchesse de Lévis, du grand nom d’Aubusson ;