Page:Chatelain - Rayons et reflets.djvu/365

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Et laissant à son ire ouverte la barrière,
Ainsi sur ce chasseur fit feu de son fusil :

        “ Membre orgueilleux de cette race errante
Qui va de lieux en lieux promener l’épouvante,
Et dont le grand exploit digne en tout d’un badaud
        Est d’assassiner un levraut !
Garde-toi de tirer ici ton espingole ;
Au large !… va plus loin, porter ta gloriole.
Bien que ton œil sur moi s’abaisse avec dédain,
        Je vaut mieux que toi, c’est certain.
Nature en te marquant au coin de la sottise
        A pronostiqué ta bêtise.
Quels sont tes soins ici ? Conserver le gibier !…
        Et dans quel but ? vilain avare !
Sinon de par tes mains le détruire en entier !
        Car, entre nous, ta vie est une tare.
        Pourquoi vis-tu ? Mon Dieu, c’est avéré.
Pour opprimer le pauvre, et flouer le curé,
        Pour te vautrer trop souvent dans l’orgie,
Et du vice en un mot être l’apologie.
Oui, voilà les hauts faits de ta virilité !
C’est curieux trouver, le dis en vérité,
Sur le sol varié de l’immense nature,
Une plante, l’Orchis[1] à l’homme d’aventure
        Ressembler par plus d’un côté ;
Mais c’est honteux de voir de culbute en culbute
L’homme tomber si bas dans sa perversité,
Qu’à la plante il ressemble en mal la pauvre brute ! ”


――――
SOUTHEY (ROBERT).*
Le Fleuve.


Oh ! fleuve ! oh ! charmant fleuve ! oh ! charmant petit fleuve !
Tu miroites gaiement en faisant ton chemin,
Dansant sur les cailloux comme un malin gamin,
Qui joue insouciant, sans soin du lendemain,
                  Et sans que rien jamais l’émeuve !

  1. La plante Acerus Anthropophera, orchis, appelée vulgairement l’homme vert