Groupe E.
Le Conte du Clerc.
Le Prologue du Clerc.
« Messire Clerc d’Oxford (dit notre hôte),
vous chevauchez aussi coi et muet que pucelle
nouvellement épousée, assise au repas de noces ;
de ce jour n’entendis-je un mot de votre langue.
Je crois que vous étudiez quelque sophisme,
mais Salomon a dit : « Un temps pour chaque chose ».
Pour l’amour de Dieu, faites-nous meilleure mine :
ce n’est point ici le moment d’étudier.
Racontez-nous quelque joyeuse histoire, pardieu !
car tout homme qui est entré en un jeu
doit nécessairement à ce jeu consentir.
Mais ne prêche pas, comme frère en carême
pour nous faire pleurer nos vieux péchés,
et que ton histoire ne nous fasse point dormir.
Raconte-nous quelque joyeuse aventure :
vos phrases, vos images et vos figures,
gardez-les en réserve jusqu’à ce que vous rédigiez
dans le grand style dont on écrit aux rois.
À présent, parlez assez simplement, je vous en prie,
pour que nous puissions comprendre ce que vous direz. »
Ce digne clerc répondit bénignement :
« Hôte (dit-il), je suis sous votre férule ;
pour l’instant vous nous avez en votre gouverne,
aussi vous rendrai-je obéissance
autant que le veut la raison, c’est certain.
Je vais vous raconter une histoire[1], laquelle
- ↑ Empruntée par Chaucer à la traduction latine que fit Pétrarque du dernier conte de Boccace dans le Decameron. Les deux textes originaux ont été publiés