Page:Chaucer - Les Contes de Canterbury.djvu/89

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de vagues vertes et brillantes comme verre.
Elle avait une citole en sa main droite,
1960et sur sa tête, bien plaisante à voir,
une guirlande de roses fraîches et parfumées ;
au-dessus de sa tête ses colombes voletaient.
Devant elle se tenait son fils Cupidon ;
sur ses épaules il avait deux ailes,
et il était aveugle, ainsi qu’on voit souvent ;
il portait un arc et des flèches brillantes et aiguës.

Pourquoi ne vous dirais-je pas aussi
le portrait qui était sur le mur
dedans le temple du puissant Mars le rouge ?
1970Le mur entier était peint en long et large,
et figurait l’intérieur de ce lieu farouche
qui avait nom le grand temple de Mars en Thrace,
en cette région froide et glacée
où Mars a son hôtel souverain.
D’abord sur le mur était peinte une forêt
en laquelle ne demeurait homme ni bête,
avec de vieux arbres tors, noueux, stériles,
aux souches anguleuses et horribles à voir,
et où passait un fracas et une rafale
1980comme si une tempête allait rompre chaque branche ;
et au bas d’une colline, sous une pente verte,
s’élevait le temple de Mars armipotent,
tout ouvré d’acier bruni, et dont l’entrée
était longue et étroite et horrifique à voir.
Et de là sortait une telle furie et tourmente
qu’elle faisait branler tous les portails.
La lumière du nord entrait par les portes,
car il n’y avait aucune fenêtre dans le mur
par laquelle on pût percevoir La moindre lueur.
1990Les portes étaient toutes d’adamant éternel,
rivées en travers et longueur
de dures barres de fer ; et pour rendre solide
ce temple, chaque pilier de soutien
était gros comme un tonneau et fait de fer poli et luisant.
Là je vis d’abord le noir complot
et toute l’entreprise de félonie ;