Page:Chefs-d’œuvre de Lord Byron, trad. A. Regnault, tome II, 1874.djvu/20

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Non les traîtres payant le bien en perfidie ;
Sans penser que ces dons et ces rares faveurs
Dont la vertu souvent par le ciel est bénie
Lui laissèrent de quoi faire encor des heureux.
Craint et calomnié lui-même, avant que l’âge
Vînt affaiblir ce corps robuste et vigoureux,
Il haïssait trop l’homme en sa précoce rage
Pour sentir le remords, n’écoutant que la voix
De son ressentiment, voix fière qui l’appelle
Et le pousse à venger, dans son aveugle zèle,
Les torts de quelques-uns sur le reste à la fois.
Coupable il se sentait ; mais nul de ses semblables
À ses yeux ne valait plus, ni n’était meilleur.
Méprisant les plus purs et les plus respectables,
Gomme hypocrites faux voilant d’une couleur
Ce que de plus hardis faisaient avec audace,
Il ne craignait jamais de se montrer en face
Dans l’éclat du grand jour, en présence de tous.
Il se sentait haï ; mais il voyait à terre
Tremblants, ramper ces cœurs pour lui-pleins de dégoûts.
Farouche, misanthrope, étrange, solitaire,
Exempt d’affection, au-dessus du dédain,
Son nom créait l’effroi, ses actes, la surprise.
Bizarre, énigmatique, on l’ignore, on le craint,
On n’ose rien de plus, et nul ne le méprise.
On foule au pied le ver. Replié dans son sein
Si l’on a rencontré le serpent, on s’arrête