Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/245

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rien d’inquiétant ; ce n’était pas celle d’un malandrin. Elle se rassura tout à fait quand elle vit apparaître un joli garçon, à la fine moustache blonde, qui portait sur ses épaules tout l’attirail d’un peintre. C’en était un en effet, car il s’appelait Henri Lestoc, et il revenait de faire une étude dans la gorge du Houx. Si son talent ne fait pas banqueroute, peut-être l’appellera-t-on un jour le grand Lestoc ou Fortuny II ; pour le moment, on le traite de petit, non qu’il soit court sur jambes, mais parce qu’il est mince, svelte, fluet, ce qui ne l’empêche pas d’avoir une santé de fer. Jusqu’à trente ans au moins, il aura l’air jeunet. Il y a du reste deux petits Lestoc, celui que connaissent les hommes et celui que connaissent les femmes. Avec les hommes, il est froid, réservé, compassé, narquois, sèchement ironique, gai par accès, mais toujours pince-sans-rire ; beaucoup de gens le prennent pour un Anglais. Auprès des femmes, il est tout autre : il a des naïvetés volontaires, des candeurs calculées, jointes à l’effronterie d’un page, et il se permet de grandes libertés sans qu’elles se fâchent. Se fâche-t-on contre un enfant ?

L’une d’elles, qui le connaît bien, disait de lui :

« C’est Chérubin qui en est à sa seconde comtesse et à sa seconde manière.