Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/87

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« À votre tour, soyez franc, reprit-elle. Vous n’avez pas le talent de mentir, c’est un peu pour cela que je vous aime. Vous m’aviez annoncé que vous écririez à Mme de Penneville… Le marquis est sa réponse.

— J’en conviens, dit-il ; mais, quand l’univers entier se mettrait entre vous et moi, il y perdrait ses peines. Vous savez si je vous aime, si je vous adore.

— Votre cœur est à moi, bien à moi ? demanda-t-elle en lui jetant un regard ensorcelant.

— Pour toujours, pour jamais ! » répondit-il d’une voix étouffée.

Ils approchaient d’une charmille, dont l’entrée était étroite. Mme Corneuil passa la première, et quand Horace l’eut rejointe, se retournant, elle demeura immobile devant lui et le contempla avec un sourire mélancolique. Jusqu’à ce jour, elle l’avait tenu à distance, sans lui rien accorder, sans lui rien permettre. Par une inspiration soudaine, elle dépouilla sa farouche vertu et avança doucement vers lui son front et ses lèvres, qui semblaient réclamer un baiser. Il comprit, mais il eut peur d’avoir mal compris. Il hésitait, enfin il osa, et, la serrant dans ses bras, il appuya ses lèvres sur les siennes. Ce baiser le mit hors de lui, le grisa :