Page:Chesterton - Le Nommé Jeudi, trad. Florence, 1911.djvu/170

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déjà en vue. Il se retourna. Mais il n’y avait pas de fumée à l’horizon.

Le colonel mit un genou à terre pour ouvrir le fourreau, d’où il tira deux épées égales, dont les lames vibrèrent dans la lumière comme deux traits de feu. Il offrit l’une au marquis de Saint-Eustache, qui s’en saisit sans cérémonie. Syme pesa la sienne, la courba, l’étudia aussi longtemps que les convenances le permettaient. Puis, le colonel prit une seconde paire d’épées, donna l’une au docteur Bull, garda l’autre, et mit les combattants face à face.

Syme et le marquis s’étaient dépouillés de leurs vêtements jusqu’à la ceinture. Les témoins se tenaient auprès de leurs clients, mais avaient gardé leurs habits sombres.

Les adversaires échangèrent le salut des armes, puis le colonel dit :

— Engagez !

Et les deux lames se touchèrent en frémissant.

Au contact du fer, Syme sentit s’évanouir toutes les terreurs diverses dont il avait été assailli pendant les jours précédents, ainsi qu’un homme qui s’éveille dans son lit oublie ses rêves. Il s’en souvenait avec ordre et clarté comme d’illusions causées par un malaise nerveux. La peur que lui avait inspirée le professeur avait été celle des événements tyranniques qui se succèdent dans le cauchemar. Quant à celle qu’il avait ressentie devant le docteur, elle lui était venue de l’invin-