Page:Chesterton - Le Nommé Jeudi, trad. Florence, 1911.djvu/187

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départ de Londres, mais il est impossible qu’il ait ainsi pris le monde d’assaut.

Et regardant de nouveau dans la direction de la petite gare et des champs avoisinants :

— Oui, reprit-il, c’est toute une foule qui vient à nous ; mais ce n’est pas l’armée organisée que vous y voyez.

— Oh ! dit Ratcliff, dédaigneux, ce n’est pas eux qui sont à craindre. Mais permettez-moi de vous faire observer que la force de cette racaille est proportionnée à la nôtre et que nous ne sommes pas grand’chose, mon ami, dans l’univers soumis à Dimanche. Il s’est personnellement assuré de toutes les lignes télégraphiques, de tous les câbles. Quant à l’exécution des membres du Conseil suprême, ce n’est rien pour lui, ce n’est qu’une carte postale à mettre à la poste, et le secrétaire suffit à cette bagatelle.

Et Ratcliff cracha dans l’herbe. Puis, se retournant vers les autres, il dit avec une certaine sévérité :

— Il y a bien des choses à dire en faveur de la mort. Mais, si l’un de vous se sent quelque préférence pour la vie, je lui conseille vivement de me suivre.

Sur ces mots, sans plus attendre, il tourna son large dos et se dirigea avec une muette énergie vers le bois.

En jetant un regard derrière eux, les autres s’aperçurent que le groupe sombre s’était détaché de la gare et s’avançait à travers la plaine avec une