Page:Chesterton - Le Nommé Jeudi, trad. Florence, 1911.djvu/216

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— Qu’y a-t-il, que diable ? s’écria le professeur en lui saisissant le bras.

— L’étoile du matin est tombée ! dit Syme.

Et l’auto elle-même se précipitait dans la nuit comme une étoile qui tombe.

Les autres, sans comprendre l’énigmatique parole de Syme, regardaient autour d’eux avec désespoir. Mais, en se retournant, ils virent la cavalerie lancée à leur poursuite : en avant galopait le bon aubergiste du Soleil d’Or, et son visage flamboyait dans l’innocence des derniers feux du soir.

— Le monde est devenu fou ! gémit le professeur en se cachant la figure dans ses mains.

— Non, protesta Bull avec l’entêtement d’une humilité plus solide que le diamant, c’est moi qui suis fou.

— Qu’allons-nous faire ? demanda le professeur.

— Pour le moment, répondit Syme du ton précis d’un observateur désintéressé, nous allons cogner un réverbère.

La seconde d’après l’automobile, avec un bruit de catastrophe heurta un objet de fer. L’instant d’après les quatre hommes s’étaient à grand-peine dégagés d’un chaos de métal et au bord de la jetée, un réverbère tordu et courbé ressemblait à la branche d’un arbre brisé.

— Allons, dit le professeur avec un léger sourire, nous avons cassé quelque chose, c’est une consolation.

— Deviendriez-vous anarchiste ? gronda Syme,