Page:Chesterton - Le Nommé Jeudi, trad. Florence, 1911.djvu/269

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ne l’entendiez jamais plus. Le soleil dans le ciel la démentait, le ciel même et la terre, la sagesse humaine, tout démentait cette voix. Et moi-même, je la démentais, quand je vous apparaissais à la lumière du jour.

Syme eut un brusque mouvement. Mais le silence ne fut pas rompu et l’incompréhensible poursuivit :

— Mais vous étiez des hommes. Vous avez gardé le secret de votre honneur, bien que la création tout entière se transformât en instrument de torture pour vous l’arracher. Je sais combien près vous avez été de l’enfer. Je sais, Jeudi, comment vous avez croisé le fer avec Satan-Roi, et vous, Mercredi, comment vous avez proféré mon nom à l’heure du désespoir.

Il régnait un absolu silence dans le jardin illuminé d’étoiles, et le secrétaire se tourna implacable, les sourcils froncés, vers Dimanche, et l’interrogea d’une voix rauque :

— Qui êtes-vous ? qui êtes-vous ?

— Je suis le Sabbath, répondit l’autre sans bouger : je suis la paix du Seigneur.

Le secrétaire bondit sur ses pieds, froissant dans ses mains le drap précieux de son vêtement :

— Je comprends ce que vous voulez dire, cria-t-il, et c’est là précisément ce que je ne puis vous pardonner ! Je sais que vous êtes la satisfaction, l’optimisme et — comment dit-on encore ? — la réconciliation finale. Eh bien ! moi, je ne suis pas