Page:Chesterton - Le Nommé Jeudi, trad. Florence, 1911.djvu/274

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

être fidèle à la loi puisse mériter la gloire de l’anarchiste dans son isolement. C’est pour que chacun des défenseurs de la loi et de l’ordre soit aussi brave qu’un dynamiteur et le vaille. C’est pour que le mensonge de Satan puisse lui être rejeté au visage. C’est pour que les tortures subies et les larmes versées nous donnent le droit de dire à ce blasphémateur : Vous mentez ! Nous ne saurions payer trop cher, d’agonies trop cruelles, le droit de répondre à notre accusateur : Nous aussi, nous avons souffert. — Non, il n’est pas vrai que nous n’ayons jamais été brisés. Nous avons été brisés et roués sur la roue. Il n’est pas vrai que nous ne soyons jamais descendus de ces trônes : nous sommes descendus en enfer. Nous nous plaignions encore de souffrances inoubliables, dans le moment même où cet homme est venu nous accuser insolemment d’être heureux. Je repousse la calomnie : non, nous n’avons pas été heureux, je puis le dire au nom de chacun des grands gardiens de la Loi qu’il a accusés. Du moins…

Il s’était tourné de telle sorte que tout à coup il vit le grand visage de Dimanche qui souriait étrangement.

Avez-vous jamais souffert ? s’écria Syme d’une voix épouvantable.

Le grand visage prit soudain des proportions effrayantes, infiniment plus effrayantes que celles du colossal masque de Memnon qui terrorisait