Page:Chesterton - Le Retour de Don Quichotte.djvu/51

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— Ha ! dit aimablement M. Wister, je suis content de voir que vous avez aussi lu Shakespeare.

Braintree poursuivit sans tenir compte de l’interruption ;

— Le bruit du marteau qui cognait toujours dans votre cave s’arrête un instant. Qu’est-ce que vous dites alors à l’homme qui est là dans l’obscurité ? « Merci pour votre bon travail » ? Ou même : « Au diable votre mauvais travail ! » Non, ce que vous lui dites, c’est : « Reposez-vous… Continuez à sommeiller… Rentrez dans votre repos normal… Persistez dans cette tranquillité complète qui vous est propre et que rien ne devrait jamais troubler. Continuez ces mouvements rythmés qui bercent votre sommeil, qui sont pour vous une seconde nature, et font partie de l’essence des choses. Continuez, comme dit Dieu dans l’histoire de Belloc, et surtout, pas d’agitation ! »

Tandis qu’il parlait avec ardeur mais sans violence, il s’aperçut que beaucoup de regards s’étaient tournés vers lui et son groupe. Il distingua Murrel qui le regardait avec une mélancolie amusée, en fumant sa cigarette, et Archer qui jetait de temps à autre un coup d’œil par-dessus son épaule, comme s’il craignait qu’il ne mît le feu à la maison. Il vit les visages attentifs et un peu anxieux de plusieurs femmes, de celles qui sont toujours assoiffées d’incidents imprévus. Les plus proches de lui restaient rêveurs et surpris, mais dans un coin éloigné de la pièce, il voyait distincte, et même démesurément distincte, la figure pâle de la petite Miss Ashley à la boîte de couleurs, qui ne le quittait pas des yeux.

— Cependant l’homme de la cave n’est qu’un étranger venu de la rue, continua-t-il, descendu dans votre trou noir pour attaquer un rocher, comme il pourrait attaquer une bête sauvage ou quelque force