Page:Chevalier - Peaux-Rouges et Peaux-Blanches, c1864.djvu/38

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année, par trains de plaisir, visiter le Sault-Sainte-Marie. La civilisation, la police, le luxe, l’ont envahi, la crinoline, c’est tout dire, y a porté ses cerceaux.

Il existe, — qui l’eût cru, grand Dieu ! — une gazette dans cette région naguère si complètement ignorée, une gazette à prétentions spirituelles, encore, le Lake Superior Journal. N’alléchait-elle pas, dernièrement, les voyageurs, curieux de parcourir les merveilles de son site, par un pompeux article, duquel nous détacherons cette ligne :

« As-tu jamais vogué sur une gondole à Venise ? » n’est plus une question. Maintenant, on demande sans cesse : « As-tu jamais sauté les Rapides de Sainte-Marie dans un canot d’écorce ? » Quiconque est capable de répondre affirmativement à cette intéressante question, peut se vanter d’avoir joui du plus agréable divertissement qu’il soit possible de se procurer sur l’eau. »


Tout en faisant mes réserves pour la vanité de clocher qui a présidé à la rédaction de cette réclame, j’avoue que le divertissement a quelque chose de fascinateur comme l’abîme, et que la scène dont on jouit sur le bord de la chute est fort émouvante.

M. Pisani, qu’on ne saurait accuser de partialité aveugle, en parle en ces termes :

« C’est un des plus beaux spectacles de l’Amérique. L’eau bouillonne et tourbillonne comme si elle s’échappait du coursier d’une roue hydraulique ; seulement le coursier a quinze cents mètres de large et quinze cents