Page:Chevreul - De la baguette divinatoire, 1854.djvu/267

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n’arrive pas tout à coup à sa conclusion ; il la prépare en la prédisposant à l’accepter, et ce n’est qu’après y être parvenu que ses derniers arguments viennent assurer son triomphe.

322.Le poëte imite l’orateur.

323.Le littérateur, plus disposé à plaire, à intéresser qu’à instruire, a recours précisément aux mêmes moyens ; préparation pour prédisposer le lecteur à recevoir de la fin tout l’effet qu’il s’est proposé de produire.

324.En définitive, dans l’œuvre intellectuelle de l’orateur, du poëte et du littérateur, les accessoires doivent être choisis et gradués de manière que l’œuvre achevée, ils en paraissent des parties essentielles, tant la disposition en aura été heureuse pour intéresser, toucher et émouvoir profondément, et tant ils auront bien prédisposé à faire sentir l’objet final de l’œuvre.

325.Si nous examinons l’œuvre scientifique orale ou écrite, faite non pour toucher et émouvoir en parlant au cœur, mais pour instruire, nous arriverons encore à la même conclusion en ce qui concerne la nécessité d’une prédisposition préalable des personnes auxquelles on s’adresse. Mais alors la sensibilité n’est plus en jeu, c’est à la seule raison qu’on parle. La meilleure marche à suivre consiste à exposer d’abord les vérités les plus accessibles aux esprits qu’il faut instruire, et à s’élever graduellement à celles qui le sont le moins. C’est ainsi qu’on prédispose les esprits à recevoir les vérités les plus difficiles à apprendre.