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Page:Chincholle - Dans l’Ombre, 1871.pdf/17

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pourtant loin d’avoir une bonne réputation, mais la fortune laverait celle d’un assassin. L’on espérait aussi que le mariage changerait ma conduite, ce qui arrive parfois. Y a-t-il une chose impossible ? Chaque père me fit donc démontrer que. je serais un maladroit si je ne prenais pas sa fille. On m’ornait tant la marchandise que je n’en voyais pas la substance, et comme j’ai toujours désiré savoir ce que j’allais manger, je ne me mariai point. Il est vrai que je n’aimais sérieusement qui que ce fût au monde ; je pensais trop à moi pour m’inquiéter des autres. Je ne faisais rien ; j’avais pris quelques inscriptions à l’École de droit. Mais pour travailler il faut en avoir besoin ou penser qu’on ne s’appartient pas tout à fait et qu’homme on se doit aux hommes. Or, comme j’avais de l’argent plein mes poches et nulle idée morale ou philosophique en tête, je laissai là les études pour ne songer qu’à mes plaisirs. Maintenant que je les envisage du haut de ma vieillesse, tristes plaisirs que ceux qui m’occupaient alors ! Puisses-tu n’y jamais goûter, cher enfant ; j’ai trop de regrets au cœur. La barbe te pousse, on peut te raconter tout. D’ailleurs je trouve que le