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Page:Chincholle - Dans l’Ombre, 1871.pdf/202

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Paris où elle habitait, la jeune femme. Aujourd’hui il revient à Morlancourt se retremper dans l’air natal, revoir les lieux où il a goûté les joies pures de l’enfance, chasser de son cœur, à coups de malédictions, cette femme qui de ce paradis a fait l’enfer. Nous sommes en décembre, en un mois où, depuis qu’elle est née, Julia est toujours restée à Paris. Comment se trouverait-elle à Morlancourt sans la volonté expresse de la fatalité ?

Et Henri se leva et parcourut la chambre en riant et en disant fiévreusement :

— Avez-vous vu son mari, ce gros Francisque. C’est qu’il a l’air heureux, par ma foi ! Ah, tu peux être tranquille, va, misérable. Je n’essayerai même pas de troubler ton bonheur.

Eh effet, il y a des femmes qui sont mieux protégées par la répulsion qu’inspirent leurs maris qu’elles ne le seraient peut-être par leur propre vertu. Et Julia avait au moins un bouclier, Francisque.

Si tristes que fussent les réflexions d’Henri, elles devaient être attristées encore. Soudain les sons d’une musique lugubre enveloppèrent de mélancolie le corps même du pauvre poëte. Non loin de