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Page:Chincholle - Dans l’Ombre, 1871.pdf/211

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nouveau essayer d’ouvrir la fenêtre. Elle veut briser les carreaux, crier, faire n’importe quoi pour tâcher de sauver cet homme, qui l’a toujours méconnue ! Instinctivement, elle regarde à travers le rideau : ses yeux ne voient plus ! Alors elle tente de saisir la ferrure de la fenêtre : ses doigts n’ont plus ni force, ni mobilité, ni sensation ! Autour d’elle, c’est l’ombre, c’est le vide… C’est le silence même, car l’orgue s’est tu. Et le morceau, qu’elle n’écoutait pourtant pas, maintenant elle sait qu’elle ne l’entend plus. Mais voici trois mots horribles que perçoit vaguement son oreille tendue comme l’est celle d’un aveugle :

— Je me meurs ! dit le pauvre joueur d’orgue affamé.

Et Madeleine, que la raison abandonne, se demande si ces mots ont été dits par Henri ou par elle, qui se sent mourir. Et ces mots, elle les répète en tombant sur le parquet, les bras sans mouvement, le sein sans battement, près de cette fenêtre derrière le rideau de laquelle son cœur battait trop tout à l’heure…

— À boire ! demande le joueur d’orgue qui, pour lutter encore contre le froid ex-