te laisserai donc qu’une faible somme pour aider à tes débuts. Je veux que tu préludes à la vie par la lutte et le malheur. La science des misères humaines excite à les secourir. Poussé par la pitié, l’ambition, l’amour du bien-être, tu sentiras le besoin de t’enrichir et de devenir quelque chose ; tu ne vivras pas aussi bêtement que moi. Si le jugement dernier n’est pas une fable, tu pourras sans rougir donner une réponse à Dieu, quand il te demandera : « Qu’as-tu fait ? » Mais, hélas ! moi, que lui dirai-je ?
— Ne crains rien, cher oncle. Tu parles de Dieu ; à ses yeux, mon avenir sera ta gloire. Je le veux !
— Tu consens donc à racheter ma vie ?
— Oui, je vivrai pour toi et pour moi.
Et l’oncle et le neveu s’embrassaient. La mort était là. Ils la voyaient, ils la sentaient, et ils pleuraient des larmes de joie ; ils se félicitaient !
— Jamais je n’ai été aussi heureux et je te dois mon bonheur, disait le vieillard.
— Je te devrai le mien, répondait le jeune homme.
— Oui, si je te sauve de ma vieillesse, murmura le moribond. À boire !