Page:Choderlos de Laclos - Les Liaisons dangereuses, 1869, Tome 1.djvu/137

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respondance réglée : car je compte pour peu le rendez-vous que je lui demande, & qui n’a presque d’autre objet que de l’accoutumer d’avance à n’en pas refuser d’autres quand ils me seront vraiment nécessaires.

La seule chose qui me reste à faire avant mon départ, est de trouver un moyen de savoir quels sont les gens qui s’occupent à me nuire auprès d’elle. Je présume que c’est son pédant de mari ; je le voudrais : outre qu’une défense conjugale est un aiguillon au désir, je serais sûre que du moment qu’elle aura consenti à m’écrire, je n’aurais plus rien à craindre de ce côté, puisqu’elle se trouverait déjà dans la nécessité de le tromper.

Mais si elle a une amie assez intime pour avoir sa confidence, & que cette amie-là soit contre moi, il me paraît nécessaire de les brouiller, & je compte bien y réussir : mais avant tout il faut être instruit.

J’ai bien cru que j’allais l’être hier ; mais cette femme ne fait rien comme une autre. Nous étions chez elle au moment où on vint avertir que le dîner était servi. Sa toilette se finissait seulement, & tout en se pressant, & en faisant des excuses, je m’aperçus qu’elle laissait la clef à son secrétaire ; & je connais son usage de ne pas ôter celle de son appartement. J’y rêvais pendant le dîner, lorsque j’entendis descendre sa femme de chambre : je pris mon parti sur le champ ; je feignis un saignement de nez, & sortis. Je volai au secrétaire ; mais je trouvai tous les tiroirs ouverts, & pas un papier écrit. Cependant on n’a pas d’occasion de les brûler dans cette saison. Que fait-elle des lettres