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Page:Choquette - Les Ribaud, 1898.djvu/189

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Les Ribaud

souffres… la souffrance aussi grandit l’amour.

— Grandir mon amour !… Mais c’est le briser, l’anéantir qu’il faut… Je me fais horreur à moi-même ; j’ai honte ; je me représente le sentiment général de mépris que je dois soulever autour de moi ; et quand, réalisant tout ça, je veux me raidir pour y échapper, un nom, un seul nom me traverse l’esprit et je me sens vaincue, écrasée… Ah ! si vous compreniez ce que c’est, mon bon curé, que d’aimer.

Celui-ci resta un instant rêveur.

— Je comprends, va, Madeleine… N’as-tu jamais songé que j’ai été jeune comme toi ; que je n’ai pas toujours porté cette soutanelle de deuil ? J’ai révé moi aussi ; j’ai pleuré moi aussi. Mes cheveux n’ont pas toujours été blancs ; j’ai eu vingt ans, Madeleine, ils sont bien loin, n’est-ce pas