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L’ŒIL DU PHARE

l’ardeur inquiète dans l’emploi du temps, qui fait les vaillants et les parvenus. Et le jour n’est pas éloigné maintenant où il souffrira secrètement de vivre sans autres objectifs que ceux de l’inutile jouisseur.

L’inanité de sa vie lui apparaît de plus en plus pénible à mesure qu’il voit prospérer ce cousin du Canada qu’il a lui-même relevé de son abjection, ce déraciné qui provigne dans un terroir nouveau où lui-même, si somptueusement qu’il le fasse, ne sait plus que végéter.

Ah ! s’il avait au moins la passion des honneurs publics, qui, dans l’agglomération sociale et démocratique de ce vaste état, conduit au pinacle, complète tant de carrières au début besogneuses ! Il n’a pas cette passion ! Il est mal préparé à la recherche de ces honneurs. L’esprit public, l’amour national n’a apporté aucun ferment au sang canadien qui circule dans ses veines. Ses enfants, peut-être, ce cher fils qui vient de lui naître et dont l’existence encore si frêle l’impressionne déjà d’un sentiment complexe, réunissant le souvenir de ses