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ÉTIENNE DOLET

de se séparer des barbares au milieu desquels on les avait jetés. Mais je ne trouve aucun passage qui vaille la peine d’être cité. En tant qu’exercice de rhétorique fait par un jeune cicéronien, par un étudiant plein d’ardeur, par un bon latiniste imbu des sentiments et des expressions de son maître, ne s’inquiétant point des conséquences, peu soucieux de ceux qu’il offense, manquant complètement de jugement, désirant avant tout donner libre carrière à son indignation, et aussi à son savoir, ce discours est excellent, mais on y trouve trop de généralités, et il ressemble trop, à tous égards, à un discours de rhéteur, pour que nous nous y attardions.

La harangue paraît avoir été adressée non seulement aux étudiants français, ou même aux seuls étudiants, mais à une nombreuse assemblée composée de beaucoup d’autres personnes. Elle excita une grande irritation parmi les Toulousains et les Gascons, et l’orateur de la nation gasconne y répondit ; quels que fussent les mérites de cet étudiant comme érudit, il paraît avoir déployé dans son discours les qualités qui ont toujours rendu célèbres ses compatriotes et avoir prêté le flanc à une réplique facile et victorieuse de la part de Dolet. Aucun fragment de la réponse de Pinache[1]— tel était le nom de l’orateur gascon — n’est venu jusqu’à nous, et tout ce que nous en savons, nous le devons aux allusions qu’y fait Dolet dans son second discours et dans ses lettres adressées à Arnoul Le Ferron, à ce qu’en disent ce dernier et Jules-César Scaliger dans leur correspondance, et surtout à cette phrase pleine de mépris de Simon Finet : « Lorsque l’orateur (Dolet) eut fini, un certain Gascon se leva, c’était un grammairien, un homme populaire ; il jouissait de la considération des étudiants, et pour se montrer plus impudent, pour injurier plus violemment les Français, et accumuler plus

  1. Pinachius. Je ne connais son nom que sous sa forme latine, tel qu’il se trouve dans les livres ou documents contemporains, mais les biographes de Dolet l’appellent tous Pinache. La Faille toutefois donne à l’orateur gascon le nom de’Prignac.