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CHAP. VIII. — GUILLAUME BUDÉ ET JACQUES BORDING

au milieu de ces temps de perturbations et de misères, je n’en conserve pas moins tout mon courage ; de même que dans les périodes de calme et de prospérité, où mes affaires vont selon mon désir, je m’efforce de faire preuve de fermeté et de résolution, à l’heure présente je m’efforce de résister bravement au malheur. Ainsi mes soucis ne sont pas accrus, mais allégés grâce à la fermeté de mon esprit et au soutien d’une conscience pure. Je me consacre entièrement à la littérature, et cela me prend tout mon temps. Cette occupation chasse tous mes ennuis et toutes mes misères et n’apporte pas un léger remède à mes peine, et à mes maux, elle me fait voir clairement, à moi qui suis exposé à tous les coups de la fortune, qu’on ne doit se tourmenter que si l’on est coupable de quelque méfait ou de quelque crime, et qu’il ne faut pas se troubler si l’on est en butte aux insultes et aux attaques des méchants. Aussi je veux qu’on me juge d’après mon caractère et non d’après les événements. Écrivez-moi ce que vous saurez de toute cette affaire ; vous soulagerez mes peines et complairez au désir de votre ami. Encore une fois, adieu. »

Peu après cette lettre, Dolet trouva qu’il était nécessaire, bien qu’il fût gravement malade, de quitter son lieu de retraite et de partir pour Lyon. Il aurait, parait-il, fait le voyage à pied, environ quatre-vingts lieues — en compagnie de son fidèle ami Simon Finet. L’été était très chaud, les routes étaient couvertes de poussière, et à son arrivée au Puy (en Velay) il eut une nouvelle attaque de fièvre et dut s’arrêter pendant quelques jours. Au moment où il allait quitter cette ville, il eut le bonheur de recevoir une lettre de son ami Clausane, auquel, à sa première halte, il répondit le même jour : «Votre lettre qu’on m’a remise ce matin de bonne heure, lui dit-il, m’a rempli de joie, car j’ai vu que vous alliez comme je le désirais et aussi que vous n’aviez pas abandonné le projet de m’accompagner en Italie. Cette lettre pleine de poussière et de hâte a été écrite en voyage, à trois heures de distance du Puy, où j’ai du rester quelques jours à cause d’une grave