fession littéraire proffiter de plus en plus au bien public, il vous pleut (par forme de provision, que mes labeurs ne me fussent gourmandés par ung tas de gens ignorants) me donner privileige exprès pour dix ans durant ma vie sur touts livres qui par moy seroyent composés ou emendés, corrigés et dûment reveuz. Ayant obtenu cela de vous, je me mys en mon debvoir de bien exécuter mon entreprise peu a peu et commençay a imprimer plusieurs bons livres en Latin qu’en Françoys. A ce myen commencement les Libraires de ceste ville, cognoissantz que je n’avois tels fonds de biens mondains qu’eulx, se mocquayent plus de moi qu’aultrement. Mais pour cela je ne laissay de poulsir aultre, et avec l’ayde de mes amys je prins quelcque accroissement, tant qu’en réputation d’impression correcte, et en requeste de marchandise il n’y avoit Imprimeur ou Libraire en Lyon, qui fust plus adventagé que moy. Et de la conceut l’envie grande et mortelle de ceulx de ma vocation : et au lieu de leur mocquerie accoustumée ilz ont a lafin machiné ma mort[1].»
Mais tout en admettant franchement plus d’une fois qu’il chercha à s’assurer, à l’aide de ses presses, un certain revenu nécessaire à sa situation de chef de famille, il ne se proposa, cependant, que d’imprimer des livres d’un mérite réel. «Je m’efforcerai», «écrit-il, d’augmenter, par tous les moyens possibles, les trésors de la littérature, et j’ai résolu de me concilier les mânes sacrés des anciens par la scrupuleuse exactitude de mes éditions de leurs œuvres, et aussi d’apporter tous mes soins, toute ma diligence, aux ouvrages contemporains. Mais tout en accueillant de tout cœur, et même avec empressement, les œuvres de mérite, je refuserai impitoyablement les méchants écrits de vils barbouilleurs de papier qui sont la honte de notre époque 2 . »
Cette épître est imprimée en guise de préface en tête de la traduction des
Tusculanes de Dolet, Lyon i5-|.3.
- Lettre au cardinal du Bellay placée en tcte du : De Jure Militum de Cottereau, Lyon i53g.
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