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ÉTIENNE DOLET

çais, mais plus heureux que ses contemporains plus savants, on achète du moins ses œuvres, on le cite parfois et le bibliophile français lui réserve une place dans sa bibliothèque. Mellin de St-Gelais, ainsi que d’autres poètes qui ont écrit en français, après un long intervalle de repos, a repris une certaine apparence de vie grâce à des réimpressions dont le papier, les caractères et les préfaces satisfont les plus délicats. Bonaventure Des Périers, encore que lettre morte pour le commun des hommes, n’a jamais manqué de lecteurs intelligents mais peu nombreux. Marot et Rabelais, seuls entre les écrivains de l’époque, n’ont jamais perdu la popularité qu’ils avaient acquise de leur vivant. On a toujours lu, on a toujours réimprimé leurs œuvres. Leur réputation a été fermement établie non seulement par les lecteurs ordinaires, mais par les hommes intelligents et cultivés ; de nouvelles éditions de leurs ouvrages, de nouveaux commentaires sur ce qu’ils ont écrit se publient constamment ; et bien que nous ne commettions pas la faute ridicule de placer le brillant, le naturel et le gracieux père de la poésie française moderne au même rang élevé que le sage, le spirituel et le savant auteur de Pantagruel, nous pouvons les réunir ici, comme les deux uniques auteurs français de la première moitié du seizième siècle dont les livres se voient encore dans toutes les mains — et certainement ils ont aujourd’hui un plus grand nombre de lecteurs et d’admirateurs qu’ils n’en avaient il y a trois siècles.

Ce sont ses relations avec Marot et Rabelais, plus que toute autre chose, sa mort exceptée, qui ont empêché Étienne Dolet d’être oublié et qui ont rendu au moins son nom familier à tout français instruit. Il fut à un certain moment l’ami de ces deux écrivains, et il imprima leurs œuvres. Marot adressa au moins deux odes à son « cher amy Dolet » outre la préface de la première édition complète de ses œuvres. Aucun des biographes de l’auteur de Pantagruel n’a oublié de dire que de Rome Rabelais avait envoyé à Dolet la recette du mystérieux