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CHAP. XIX. — MAROT ET RABELAIS

Garum, et que Dolet célébra dans une ode la science anatomique du célèbre médecin.

Pendant quelques années ces trois hommes furent unis par une amitié qui se fondait sur une communauté de goût de sentiments. Ils avaient tous le même amour ardent des lettres et des progrès intellectuels, la même haine de la superstition et de la bigoterie ; et bien que Marot, dont les psaumes traduits en vers ont toujours été depuis chantés dans les temples des huguenots, ait sa place marquée parmi apôtres de l’église réformée de France, il y a lieu de penser qu’il se désintéressait du dogme théologique, aussi bien que ses deux amis ; que sa sympathie pour le protestantisme ne s’adressait qu’au coté négatif de cette religion, et que pour lui, comme pour le maître, le grand peut-être était un problème insoluble et, du reste, d’un bien mince intérêt.

Il est probable que les relations de Dolet avec ces deux hommes distingués commencèrent dans la dernière partie de l’année 1534. Quand Dolet arriva à Lyon, Rabelais était le médecin du grand hôpital, il pratiquait son art dans cette ville, et jouissait d’une grande réputation de savant et d’homme habile, mais il est certain qu’on ne l’identifiait pas généralement avec Alcofribas Nasier, qui n’était alors connu que du vulgaire. Et ce fut sans doute aux soins de Rabelais que Dolet eut recours, sur la recommandation de Gryphius peut-être, lorsqu’il vint à Lyon malade de la fièvre. C’est à Paris qu’il a dû probablement rencontrer Marot au mois d’ octobre suivant. Mais nous ne savons pas au juste si ce fut alors qu’il fit la connaissance du poète ou si ce ne fut qu’à la fin de 1536, époque à laquelle Marot, après avoir subi un exil de deux années, à cause de ses opinions hérétiques, avait eu la permission de rentrer en France, et avait passé plusieurs mois à Lyon. Immédiatement après, nous voyons qu’ils sont très liés ; Dolet adresse à Rabelais une ode intitulée : De mutua inter se et Clementem Marotum amicitia, et une autre à Marot pour le féliciter d’être revenu d’exil ; ce poème commence ainsi :