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CHAPITRE XIX.

la pauvre chapelle de Dourdan, car la sœur Chevreau reçoit ce jour-là, de la main de la duchesse, 30 livres, 12 livres de madame de Châtignonville, 6 livres du duc de Montausier, 114 sols du révérend père Bourdaloue. L’illustre prédicateur est venu de Bâville, où il demeure chez mademoiselle de Lamoignon, la providence du pays, qui l’a invité à faire, dans l’église de Saint-Chéron, le catéchisme aux petits enfants au milieu desquels elle s’assied. Le P. Bourdaloue a sans doute, avant de déposer son offrande, adressé une allocution dans la chapelle de l’Hôtel-Dieu, pour stimuler la charité des nobles visiteurs. Mademoiselle de Lamoignon est là aussi, et elle revient souvent pour porter les aumônes de la grande duchesse. Chaque semaine, des sommes sont remises ou envoyées à sœur Chevreau. Les dames travaillent à l’ornementation de la chapelle, Louise d’Orléans brode de sa main un voile d’autel[1], et le 22 décembre on baptise une cloche. Mademoiselle Lefébure, fille du procureur du roi, est la marraine et donne, avec son nom de Geneviève-Thérèse, 114 sols d’aumône. Le parrain est Me Le Boistel, commissaire des guerres, qui fait un don de 16 livres 1 sol[2]. Les demoiselles riches de la ville quêtent elles-mêmes, aux fêtes, dans l’église Saint-Germain, où les marguilliers ont bien voulu faire mettre un tronc pour l’Hôtel-Dieu.

Ce qui est aussi édifiant que la charité de la grande duchesse, c’est sa persévérance dans l’œuvre qu’elle a entreprise. Pendant plus de vingt années, quand elle est à Sainte-Mesme, elle donne des aumônes de sa main à la supérieure, et toujours pour une destination spéciale : tantôt c’est 200 livres pour les pauvres honteux, tantôt 100 livres pour du pain, du bois pour faire les soupes, de l’argent pour payer le loyer des « filles de la communauté » dans une maison appartenant à l’Hôtel-Dieu, ou des aumônes pour les petites orphelines « de la Providence. » Quand elle n’est pas à Dourdan, des sommes sont remises de sa part, presque chaque mois, par le comte de l’Hôpital, mademoiselle de Lamoignon, mademoiselle de Mainville, M. de Prée, M. de la Martinière, M. Deslandres, receveur de Sainte-Mesme, ou par Michel Morin, messager de Dourdan, qui va les chercher à Montmartre ou à Picpus. Ces sommes montent, en général, à 1,200 livres par an, quelquefois davantage ; dans la seule année 1696, elles atteignent 3,472 livres. Ce n’est pas tout : Louise d’Orléans s’est faite solliciteuse auprès du duc d’Orléans, son cousin, seigneur de Dourdan, et elle a obtenu de lui d’abord 34 livres, puis 100 livres par mois, qui sont inscrites avec cette mention : « Données par la grande duchesse, provenant des charités de Monsieur pendant ce mois. »

  1. Ce voile en satin blanc brodé de rinceaux de fil d’or, de fleurs en soie et d’une tête de la Vierge, est encore conservé à l’hospice de Dourdan.
  2. Les paillasses avaient été, à ce qu’il paraît, remplacées par des lits, car M. Le Boistel exprime le vœu que son offrande serve à l’achat de tours de lit en moquette pour la salle des hommes.