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CHAPITRE VI.

un troupeau sans pasteur. Resté fidèle à la cause de son roi légitime, le prieur Michel Pourrat avait quitté son prieuré désolé et ruiné. C’est alors que par un de ces jeux dérisoires de la fortune, Henri VI, roi de France et d’Angleterre, protecteur et gardien des églises de son royaume de France, pour remédier à l’absence de ce prieur passé ès pays à lui contraires, donna au prieuré de Louye, pour administrateur intérimaire, Pierre Galle, le prieur des Moulineaux[1].

Le jour où Jeanne d’Arc, après avoir sauvé la France, tombait entre les mains des Anglais (1430), un preux chevalier, son compagnon d’armes, le sire Etienne de Vignolles, plus connu dans les camps sous le nom de La Hire, s’avançant jusqu’aux portes de Rouen pour délivrer la vaillante Pucelle, était pris par les soldats anglais et bourguignons, et l’histoire nous apprend que l’auteur de cette capture était Jean des Mazis, le bailli de Dourdan. « Il fut mis au chastel de Dourdan, » dit le Journal de Paris[2], et les longs ennuis de l’indomptable captif intéressèrent alors la France entière. Impatient de retrouver ses compagnons et ses habitudes de farouche indépendance, La Hire avait recours aux bonnes villes du royaume pour payer sa rançon, sans doute fort considérable. Le 27 janvier 1432, il écrivait de sa prison « à ses très-chiers et grands amis les gens d’esglise, bourgeois, manans et habitans de la cité de Lyon, » les engageant « à le secourir de la plus grande somme que possible leur seret. » Le 12 mars suivant, la fidèle ville de Tours votait, de son côté, un subside de trois cents livres tournois pour payer sa rançon aux Bourguignons, « auxquels il a esté longuement prisonnier[3]. »

En avril 1433, un de ses compagnons de captivité, Robin Boutin, transféré de Dourdan à Chartres, eut vent des menées sournoises de Laubespine, qui cherchait à rendre la place aux Anglais. De retour à Dourdan, il en informa La Hire, qui n’eut plus de cesse jusqu’à ce qu’il eût échappé à ses geôliers[4]. Il est certain qu’au mois de septembre de la même année il était libre, rejoignait son ami Xaintrailles et reprenait sa vie errante et ses courses aventureuses.

C’est sur ces entrefaites (1434) que Philippe le Hardi, sans doute dégoûté d’une seigneurie ruinée, donna Dourdan avec Étampes à son cousin Jean de Bourgogne, comte de Nevers, et dans le fameux traité d’Arras (21 sept. 1435) un article spécial reconnait cette possession de la châtellenie de Dourdan à Jean de Nevers à la condition qu’il produira en bonne forme l’ancienne donation du duc de Berry[5]. Au milieu de ces pé-

  1. A. Moutié, introduction au Recueil de pièces relatives au prieuré des Moulineaux, p. 14.
  2. Collection Michaud, p. 141.
  3. Archives de Tours. — Comptes.
  4. De Lépinois. — Histoire de Chartres.
  5. B. Fleureau, p. 179. — Coquille, Hist. du Nivernais. — De Lescornay, p. 141.