Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/336

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Car l’homme qui dédaignerait les besoins de ceux qui lui sont proches par la naissance, unis par la parenté, comment serait-il tendre envers les autres ? Chacun ne regarderait-il pas comme effet de la vanité la bienfaisance qu’exercerait envers les étrangers celui qui serait dédaigneux et impitoyable pour les siens ? Et que penser de celui qui, enseignant la foi aux étrangers, laisse les siens dans l’erreur, quand il lui serait plus facile de les instruire, quand cette bonne œuvre est plus instamment réclamée par la justice ? Non certes, dira-t-on, les chrétiens qui laissent sans soins ceux qui leur tiennent de près, ne sont guère charitables. « Et il est », dit l’apôtre, « pire qu’un infidèle ». Pourquoi ? parce que l’infidèle, s’il néglige les autres, ne néglige pas ses proches. Ainsi, celui qui ne remplit pas ce devoir, viole la loi divine et celle de la nature. Mais si celui qui ne prend pas soin de ses proches a renié la foi et est pire qu’un infidèle, quel rang assigner à celui qui commet des injustices envers eux ? avec qui le placer ? Il a renié la foi ; et comment ? C’est que, suivant la parole de l’apôtre, « ils professent qu’ils connaissent Dieu, mais ils le renient par leurs œuvres ». (Tit. 1,16) Qu’a prescrit ce Dieu, objet de leur foi ? de ne pas négliger ceux de sa famille. Et quelle est donc la foi de celui qui renie ainsi Dieu ?
Comprenons-le, nous tous qui, pour épargner nos richesses, dédaignons les besoins de nos proches. Dieu a institué les liens de la parenté afin que nous ayons des motifs multipliés de nous faire du bien les uns aux autres. Quand donc vous ne pratiquez pas une vertu que pratique un infidèle, n’avez-vous pas renié la foi ? Car il appartient à la foi, non seulement de confesser de bouche sa croyance, mais de produire des œuvres qui en soient dignes. La foi et l’incrédulité s’appliquent à chaque objet. L’apôtre donc, après avoir parlé de la mollesse et de la veuve qui vit dans les délices, nous dit qu’elle ne périt pas seulement par sa sensualité, mais parce qu’elle est par là obligée de négliger sa famille. Et cela est vrai, car elle vit pour son ventre, et par là elle périt puisqu’elle renie sa foi. « Est pire qu’un infidèle ». Car ce n’est pas une faute égale que de négliger les besoins d’un parent ou d’un étranger, d’une personne connue ou d’une personne inconnue, d’un ami, ou de celui qui ne l’est pas ; dans le premier cas le reproche mérité est plus sévère.
« Que la veuve qui sera choisie n’ait pas moins de soixante ans, qu’elle n’ait eu qu’un mari et que l’on rende témoignage de ses bonnes œuvres (9, 10) ». L’apôtre a dit « Qu’elles apprennent d’abord à faire régner la piété dans leurs maisons et à rendre ce qu’elles doivent à leurs parents ». Il a dit ensuite « Celle qui vit dans les délices est morte toute « vivante ». Il a dit : « Ne pas avoir un soin prévoyant de ceux de sa maison, c’est être pire qu’un infidèle ». Il a énoncé les défauts qui rendent une femme indigne de figurer parmi les veuves ; il énonce maintenant les conditions qu’elle doit remplir. Mais quoi ? la choisirons-nous d’après son âge ? Quel est donc ce mérite ? car il ne dépend pas d’elle d’avoir soixante ans. Non, ce n’est pas seulement d’après son âge ; quand elle l’aurait atteint, si elle ne possède pas les vertus que demande l’apôtre, elle ne doit pas être inscrite parmi les veuves. Mais il va dire pourquoi il exige un âge déterminé, et le motif ne vient pas de lui, mais des veuves elles-mêmes ; écoutons donc ce qui vient ensuite : « Aux bonnes œuvres de laquelle on rende témoignage ». Et quelles œuvres ? « Si elle a élevé ses enfants ». Ce n’est pas là une œuvre de peu de valeur ; car il ne s’agit pas seulement de les nourrir, mais de les élever, comme l’apôtre l’a dit plus haut : « Si les femmes persévèrent dans la foi, la charité et la sanctification ». (1Tim. 2,15) Vous voyez comment partout il met le bien fait à ses parents avant le bien fait aux étrangers. Car il dit en premier lieu : « Si elle a élevé ses enfants », et ensuite : « Si elle a exercé l’hospitalité, lavé les pieds des saints, pourvu aux besoins de ceux qui endurent tribulation, si elle s’est appliquée à toute sorte de bonnes œuvres (10) ». Mais quoi ? si elle est pauvre ? Elle n’est pas pour cela privée d’élever ses enfants, d’exercer l’hospitalité, de pourvoir aux besoins de ceux qui endurent tribulation. Est-il une veuve plus pauvre que celle qui avait versé deux oboles (Lc. 21) ? Quand elle serait pauvre, elle a une demeure ; elle n’habite pas en plein air. « Lavé les pieds des saints » ; ce n’est pas une grande dépense. « Si elle s’est appliquée à toute sorte de bonnes œuvres ». À quoi se rapporte ce précepte ? Par là elle est exhortée à rendre des services corporels, car les femmes y sont particulièrement propres, comme de