Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/371

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doivent être les fidèles : ils ne doivent se laisser arrêter, ni par la crainte, ni par la honte, ni par la menace, mais s’entr’aider, s’assister, se secourir entre eux, comme font à la guerre les soldats d’une même armée : Car ce n’est pas tant à ceux qui sont dans le péril qu’ils sont utiles qu’à eux-mêmes, puisqu’en participant à leurs maux, ils méritent aussi de participer à leurs couronnes. Par exemple, un ami de Dieu est dans la tribulation ; il souffre toutes sortes de peines avec beaucoup de fermeté ; il lutte comme un athlète courageux ; pour vous, vous restez à l’abri de toute persécution, vous pouvez cependant, si vous voulez ; sans mettre le pied dans le stade, partager la couronne avec l’athlète de Dieu : il vous suffit de l’assister, de lui procurer l’huile de la consolation, de l’encourager, de l’exciter. Et pour vous prouver que je dis vrai, écoutez ce que l’apôtre dit dans une autre épître : « Vous avez bien fait de vous unir à moi dans la tribulation » ; et encore : « Vous m’avez envoyé à Thessalonique une et deux fois de quoi satisfaire à mes besoins ». (Phi. 4,14, 16) Et comment, quoique absents, pouvaient-ils partager ses tribulations ? Saint Paul le dit lui-même : « Vous m’avez envoyé une et deux fois de quoi satisfaire à mes besoins ». Il dit encore au sujet d’Epaphrodite : « Il s’est vu tout proche de la mort, exposant sa vie, afin de suppléer, par son assistance, à celle que vous ne pouviez me rendre vous-mêmes ». (Id. 2,30) De même qu’auprès des rois de la terre, ceux qui combattent ne sont pas les seuls qui soient honorés, mais que ceux qui gardent les bagages ont aussi part aux récompenses, et quelquefois une part égale aux autres, bien qu’ils n’aient pas ensanglanté leurs mains, pas pris l’épée, pas même vu les rangs ennemis ; de même en est-il, et à plus forte raison, dans le service de Dieu. Celui qui porte secours au combattant mourant de faim, celui qui l’assiste, qui l’encourage par ses paroles, qui prodigue tous les soins qu’on peut donner en pareille rencontre, celui-là obtient la même récompense que le combattant.

2. En m’entendant parler d’athlète, n’allez pas vous représenter un saint Paul, un homme invincible, mais quelqu’un du commun qui, s’il n’était grandement soutenu et encouragé, ne demeurerait peut-être pas ferme, et n’en gagerait peut-être pas même la lutte. De cette manière ceux qui, sans combattre eux-mêmes, sont cause de la victoire remportée, méritent bien de partager la couronne. Faut-il s’étonner si parmi les vivants celui qui prend part aux combats est appelé à partager les récompenses des combattants, lorsque cette sorte de communion n’est pas même interdite avec ceux qui sont morts, couchés dans la tombe, déjà couronnés et qui n’ont plus besoin de rien ? C’est saint Paul lui-même qui le dit : « Communiquant avec les mémoires des saints ». – Comment cela est-il possible, direz-vous ? – Lorsque vous admirez un saint, lorsque vous imitez quelqu’une des belles actions qui l’ont fait couronner, vous participez à ses combats et à ses couronnes.

« Que le Seigneur lui accorde de trouver miséricorde devant le Seigneur en ce jour-là ». Il a eu pitié de moi, veut-il dire, donc il recevra à son tour miséricorde en ce jour terrible et redoutable, où nous aurons tant besoin de miséricorde. « Que le Seigneur », dit-il, « lui accorde de trouver miséricorde devant le Seigneur ». Quoi donc, y a-t-il deux Seigneurs ? Nullement, nous n’avons qu’un seul Seigneur qui est Jésus-Christ, et qu’un seul Dieu. C’est un des passages dont abusent les marcionites. Mais qu’ils sachent que c’est une manière de parler familière à la sainte Écriture et qu’elle en use fréquemment. Par exemple elle dit : « Le Seigneur a dit à mon Seigneur », et encore : « J’ai dit au Seigneur : Vous êtes mon Seigneur ». (Psa. 109,1, et 15,2) ; et ailleurs encore : « Le Seigneur fit pleuvoir de la part du Seigneur ». (Gen. 19,24) Cette manière de parler indique des personnes consubstantielles, et non une différence de nature. L’Écriture parle ainsi non pour nous faire entendre deux substances différentes l’une de l’autre, mais deux personnes de la même substance l’une et l’autre. Remarquez encore ce que dit l’apôtre : « Que le Seigneur lui accorde… » Quoi ? Rien autre chose que la miséricorde. Comme Onésiphore avait eu pitié de lui, il souhaite que Dieu ait aussi pitié d’Onésiphore. Si Onésiphore, qui s’était exposé aux dangers, avait besoin de miséricorde pour être sauvé, nous en aurons aussi besoin à bien plus forte raison.

Car il sera terrible, deux fois terrible le compte à rendre au Seigneur. – Nous aurons besoin de beaucoup d’indulgence pour ne pas nous entendre dire : « Retirez-vous de moi, je ne vous connais pas, vous qui opérez l’iniquité » ;