Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/376

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énigmatiques : « Personne n’est couronné, s’il n’a légitimement combattu », et : « Le laboureur qui travaille doit le premier avoir part à la récolte des fruits » ; il ajoute : « Comprenez ce que je dis. Que le Seigneur vous donne, l’intelligence en toutes choses » Cette forme sentencieuse est amenée par les précédents exemples. Ensuite il témoigne sa tendresse à Timothée en ne cessant pas de faire des souhaits en sa faveur, comme s’il craignait pour, son cher fils ; il dit donc : « Souvenez-vous : que Jésus-Christ est ressuscité, qu’il est de la race de David, selon mon Évangile, pour lequel je souffre jusqu’aux fers, comme un scélérat ».

Pourquoi rappelle-t-il ici ces choses ? C’est en même temps et pour lancer un trait aux hérétiques, et pour raffermir Timothée, et pour montrer l’avantage des souffrances ; puisque notre maître, le Christ, a vaincu la mort parla souffrance. Souvenez-vous de cela, dit-il, et vous aurez une consolation suffisante. « Souvenez-vous que Jésus-Christ est ressuscité des morts, qu’il est de la race de David ». Quelques-uns avaient déjà commencé à rejeter l’Incarnation, parce qu’elle suppose en Dieu une grandeur de bonté qui les confondait : Tels étaient les bienfaits de Dieu envers nous, que ces hommes n’osaient les attribuer à Dieu, ni croire qu’il se fût si fort abaissé pour nous.« Selon mon Évangile ». Il s’exprime souvent de la, sorte dans ses épîtres : « Selon mon, Évangile » ; soit pour faire entendre qu’il fallait lui obéir, soit parce que d’autres, prêchaient autre chose. – « Pour lequel je souffre jusqu’aux fers, comme un scélérat », Voici que de nouveau il tire de sa propre personne une consolation et un encouragement. Le disciple apprend par là que son maître a souffert : et qu’il n’a pas souffert inutilement ; deux choses propres à lui donner du courage pour la lutte. Il gagnera à faire de même, comme il perdra à faire autrement. Que servirait-il de, montrer les souffrances endurées parle maître, si elles n’étaient d’aucune utilité ? L’important c’est qu’elles aient été supportées : utilement et dans l’intérêt des disciples.

« Mais la parole de Dieu n’est point enchaînée ». C’est-à-dire, si nous étions des soldats de ce monde, si la guerre que nous faisons était une guerre sensible, ces fers qui lient nos mains pourraient quelque chose : mais Dieu nous a faits de telle sorte que personne ne peut nous vaincre. Les mains sont enchaînées, mais la langue ne l’est pas. Rien ne peut lier la langue ; excepté la timidité et le manque de foi. Tant que nous ne serons ni lâches ni chancelants dans la foi, liez tant qu’il vous plaira nos mains, la prédication restera libre. Par exemple, si vous liez un laboureur, vous empêchez la semence, car c’est, avec la main, qu’il sème. Mais quand même vous lieriez le docteur ; vous n’arrêteriez pas la parole qui se sème non avec la main, mais avec la langue. Notre parole n’est donc pas, susceptible d’être assujettie aux liens. Pendant que nous sommes, enchaînés ; elle court librement. Vous en avez la preuve puisqu’en ce moment nous prêchons, bien qu’enchaîné. C’est là un encouragement pour ceux qui sont libres. Si nous prêchons tout enchaîné, combien plus devez-vous le faire, vous qui êtes libres, Vous m’entendez dire que je souffre comme un malfaiteur, n’en soyez pas abattu. N’est-ce pas merveilleux qu’un homme enchaîné fasse l’œuvre d’un homme libre, que tout lié qu’il est, il triomphe de tout ; que tout lié qu’il est, il vainque ceux qui sont lié ? C’est qu’il s’agit de la parole de Dieu, non de la nôtre ; or des liens humains ne sauraient entraver la parole de Dieu.

« C’est pourquoi j’endure tout pour les élus, afin qu’ils acquièrent aussi le salut qui est en Jésus-Christ avec la gloire éternelle », Voici encore une autre exhortation. Ce n’est pas pour moi, dit l’apôtre, mais pour le salué des autres que je souffre ces choses. Je pourrais vivre exempt de danger, je pourrais me délivrer de tous ces maux, si je ne considérais que ma personne. Mais pourquoi enduré-je ces maux pour le bien des autres, pour que d’autres acquièrent la vie éternelle. Que promettez-vous ? Il n’a pas dit : Je souffre pour les hommes quels qu’ils soient, mais « pour les élus ». Si Dieu lui-même les a choisis, il convient que nous soutirions tout peureux, « afin qu’eux aussi acquièrent le salut », Dire « eux aussi », c’est donner à entendre comme nous-mêmes. En effet ; Dieu nous a aussi choisis. Et de même que Dieu a souffert pour nous, de même nous souffrons pour eux : c’est donc une dette que nous payons et non une grâce que nous faisons. De la part de Dieu c’était une grâce, puisque ses propres bienfaits n’avaient pas été précédés de bienfaits qu’il eût reçus. Mais de notre part ce n’est qu’une rétribution.