Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/380

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Ces apparences n’étaient pas faites pour donner de la confiance, et en promettant une vie éternelle, l’apôtre pouvait rencontrer des incrédules : Quoi ! pouvait-on lui dire, est-il bien vrai que je meure alors que je vis, et que je vive alors que je meurs ? Vous ne promettez rien pour la terre, et vous donnez tout dans le ciel ? Vous ne pouvez pas même donner peu, et vous promettez beaucoup ? Il prévient ces pensées par une affirmation nette et précise, appuyée sur des preuves données d’avance (par exemple il a dit : « Souvenez-vous que le Christ est ressuscité des morts », c’est-à-dire, que sa mort a été suivie de sa résurrection) : maintenant encore il affirme la même chose en disant : « C’est une vérité très-assurée que celui qui obtiendra la vie céleste, obtiendra aussi la vie éternelle ». Qu’est-ce qui le prouve ? « C’est que si nous mourons avec Jésus-Christ, nous vivrons aussi avec lui ». Se peut-il que partageant ses douleurs et ses travaux, nous ne partagions pas son bonheur ? Mais un homme même ne le ferait pas. Comment ! quelqu’un aurait volontairement été au supplice avec lui, à la mort avec lui, et lorsque seraient venus des jours meilleurs, il le renierait pour son compagnon ? C’est impossible. — Où donc sommes-nous morts avec Jésus-Christ ? La mort dont saint Paul parle ici est la mort par le baptême et par les souffrances. En effet, il dit ailleurs : « Portant en tout lieu dans notre corps la mortification du Seigneur » (2Co. 4,10) ; et encore : « Ensevelis avec lui par le baptême » ; et : « Notre vieil homme a été crucifié avec lui » ; et enfin : « Si nous avons été entés en lui par la ressemblance de sa mort, nous y serons aussi entés par la ressemblance de sa résurrection ». (Rom. 6,4-6)

Mais dans le passage qui nous occupe, c’est surtout de la mort par les souffrances qu’il entend parler, parce qu’il était dans les épreuves lorsqu’il écrivait ces choses. Voici le sens de ses paroles : Si nous mourons par lui, ne ressusciterons-nous pas par lui ? Cela est incontestable. — « Si nous souffrons avec lui, nous régnerons aussi avec lui ». Il n’a pas dit absolument : « Nous régnerons avec lui », mais conditionnellement : « Si nous souffrons avec lui », indiquant ainsi que ce n’est pas assez de mourir une fois (ce bienheureux apôtre mourait tous les jours), mais qu’il faut une longue patience, vertu qui était surtout nécessaire à Timothée. Commencer n’est rien si l’on ne persévère. Ensuite il a recours à un autre motif ; après avoir exhorté par la considération des biens, il exhorte par la considération des maux. Si les pécheurs devaient avoir part aux mêmes biens, ce ne serait plus une consolation. De plus, si ceux qui soutirent avec Jésus-Christ devaient, à la vérité, régner avec lui, mais que ceux qui ne souffrent pas avec lui en fussent quittes pour ne pas régner avec lui, ce serait bien une peine grave, mais dont la multitude ne serait pas très-vivement touchée. C’est pourquoi l’apôtre les menace de quelque chose de plus terrible : « Si nous le renonçons », dit-il, « il nous renoncera ». La rétribution se fera donc non seulement par les biens, mais aussi par les maux. Que devra donc souffrir celui que le Fils de Dieu reniera dans son royaume ? Songez-y. « Celui qui m’aura renié, je le renierai moi aussi ». (Mat. 10,33) Entre ces deux reniements, l’égalité n’est qu’apparente ; nous ne sommes que des hommes et lui est Dieu ; c’est tout dire.

2. Tout le mal que nous faisons retombe sur nous, non sur lui que rien ne peut atteindre. C’est ce que l’apôtre indique par ces mots : « Si nous restons incrédules, il n’en demeure pas moins fidèle, car il ne peut se renier lui-même », c’est-à-dire, nous avons beau ne pas croire en sa résurrection, il n’en est aucunement lésé. Il est la vérité même, il est infaillible, quoi que nous puissions dire ou ne pas dire. Puisque notre dénégation ne lui fait aucun tort, s’il demande notre confession, c’est donc uniquement dans notre intérêt. Pour lui il demeure le même, quelque chose que nous puissions confesser ou nier. « Pour lui, il ne peut se renier », c’est-à-dire, il ne peut pas ne pas être. Nous, nous disons qu’il n’est pas, parlant contre la vérité. Il n’a pas une nature à cesser d’être, il ne le peut pas ; il ne peut pas être réduit à n’être plus. Il demeure à jamais, sa substance est éternelle. N’ayons donc pas d’illusion, et ne croyons pas que nous puissions ni lui procurer quelque avantage, ni lui nuire. Ensuite pour qu’on ne croie pas que Timothée ait besoin de ces instructions pour lui-même, l’apôtre ajoute : « Donnez ces avertissements, et prenez-en le Seigneur à témoin. Ne vous livrez pas à de vaines disputes de paroles qui ne