Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/465

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

HOMÉLIE II.

QUI, ÉTANT LA SPLENDEUR DE SA GLOIRE ET LE CARACTÈRE DE SA PUISSANCE, SOUTIENT TOUT PAR LA PUISSANCE DE SA PAROLE, APRÈS NOUS AVOIR PURIFIÉS DE NOS PÉCHÉS. (1, 3)

Analyse.

  1. C’est avec respect que nous devons parler de Dieu. – Hérésies de Marcellus et de Photin. – Contre Sabellius et Arius.
  2. Hérésie de Paul de Samosate. – Réfutation d’Arius, de Sabellius, de Marcellin, de Photin et de Marcion.
  3. Créer le monde est une œuvre moins grande que de le conserver. – Le Fils de Dieu est tel, non seulement par la grâce, mais par la nature.
  4. Exhortation à l’humilité. – Combien les choses de cette vie sont passagères.
  5. La condition du pauvre vaut mieux que celle du riche.

1. L’esprit de piété est nécessaire en toute circonstance, mais surtout lorsque l’on parle ou qu’on entend parler de Dieu : la langue en effet ne peut proférer, l’oreille ne peut entendre de parole qui soit à la hauteur de la divinité. Et que dis-je, la langue et l’oreille ? notre âme qui leur est bien supérieure ne nous fournit pas des idées bien exactes, quand nous voulons parler de Dieu. Car si la paix de Dieu est au-dessus de toute intelligence, si l’image des biens préparés à ceux qui l’aiment ne peut entrer dans le cœur humain, combien le Dieu de paix lui-même, le créateur de l’univers, ne dépasse-t-il pas mille fois la mesure de notre raison ! Il faut donc, avec foi et piété, accepter tous les mystères, et c’est quand notre faible raison ne peut saisir sa parole que nous devons surtout glorifier Dieu, ce Dieu si supérieur à notre intelligence et à notre raison. Car nous avons sur Dieu bien des idées que nous ne pouvons exprimer ; nous avançons à son sujet bien des propositions que nous ne pouvons comprendre. Nous savons par exemple que Dieu est partout ; mais comment cela se fait-il ? nous ne le comprenons pas. Nous savons que c’est une force immatérielle, source de tout bien. Mais quelle est cette force ? bous j’ignorons. Ici nous parlons sans comprendre. Il est partout : je l’ai dit ; mais je ne le comprends pas. Il n’a pas eu de, commencement ; je parle encore sans comprendre. Je dis qu’il a engendré un Fils de lui-même, et ici encore je trouve mon intelligence en défaut. Il y a donc de ces choses qu’on ne peut pas même exprimer. L’intelligence conçoit ; mais la parole est impuissante. Et tenez ; vous allez voir la faiblesse de Paul lui-même, vous allez le voir dans l’impuissance de s’expliquer clairement, et vous frémirez, et vous n’en demanderez pas davantage. Écoutez seulement. Après avoir parlé du Fils de Dieu et avoir établi qu’il est le créateur, qu’ajoute-t-il ? « Qui était la splendeur de sa gloire et le caractère de sa substance ». Il faut accepter ces paroles avec piété, en en retranchant tout sens déplacé. « La splendeur de sa gloire », dit-il. Mais voyez dans quel sens Paul prend ces paroles, et prenez-les dans le même sens que lui. Il veut dire que le Christ tire de lui-même cette splendeur, qu’elle ne peut souffrir d’éclipse, qu’elle n’Est susceptible ni d’augmentation ni de diminution. Il y a des hommes qui s’emparent de cette image, pour en tirer des conséquences absurdes. La splendeur, disent-ils, n’est pas une substance, mais elle a une existence dépendante.
O homme ! ne prenez pas ainsi la parole de l’apôtre ; ne gagnez pas la maladie de Marcellus et de Photin. Paul vous met lui-même sous la main un préservatif contre cette erreur ; il ne veut pas vous voir affligé de cette maladie mortelle. Que vous dit-il encore ? « Le caractère de sa substance ». Cette parole qu’il ajoute montré que, tout comme le Père, le Fils subsiste en lui-même. Par cette parole, il vous fait voir qu’il n’y a pas entre eux de différence, il met devant vos yeux le caractère propre et original du Fils de Dieu, il vous apprend qu’il subsiste en lui-même dans son hypostase. Après avoir dit que Dieu a créé toutes choses par lui, il lui attribue ici la souveraine autorité. Qu’ajoute-t-il en effet ? « Soutenant tout par la parole de sa puissance ». Par là il veut nous faire toucher du doigt non seulement le caractère de sa puissance, mais l’autorité souveraine avec laquelle il gouverne tout. Voyez comme il attribue au Fils les qualités du Père. Pourquoi ne s’est-il pas contenté de dire : « Soutenant tout ? » Pourquoi n’a-t-il pas dit simplement : Par sa puissance ? Pourquoi a-t-il dit : « Par la parole de sa puissance ? » Tout, à l’heure il s’élevait peu à peu, pour redescendre bientôt ; maintenant encore de degrés en degrés, pour ainsi dire, il s’élève bien haut, puis il redescend et nous dit : « Par lequel il a créé les siècles ». Voyez comme il sait ici se frayer un double chemin. Pour nous détourner des hérésies de Sabellius et d’Arius, dont l’un ne conserve de Dieu que la substance, dont l’autre partage la nature de Dieu en deux natures inégales, il bat complètement en brèche ces deux systèmes. Et comment s’y prend-il ? Il tourne et retourne sans cesse les mêmes idées pour qu’on n’aille pas s’imaginer que le Fils ne procède pas de Dieu, et qu’il lui est étranger. Et n’allez pas trouver son discours étrange, puisque, après une pareille démonstration, il s’est trouvé des hommes qui ont dit que le Christ n’avait rien de commun avec Dieu, qui lui ont donné un autre père, qui le déclarent ennemi de Dieu ; que n’aurait-on pas dit, si Paul n’avait pas tenu ce