Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/483

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encore profondément gravé dans leur cœur. « Qui est fidèle à celui qui l’a établi ». Dans quelle charge l’avait-il établi ? Dans la charge d’apôtre et de pontife. Passant ici sous silence son essence et sa divinité, il ne parle que de ses dignités, au point de vue purement humain. « Comme Moïse en toute sa maison », c’est-à-dire au milieu de son peuple ou bien dans le temple. Il dit ici : « En sa maison », et c’est comme s’il disait : « Au milieu de ceux qui sont dans cette maison ». Car Moïse était pour le peuple Hébreu comme un intendant, comme un économe. Et, pour, prouver qu’il s’agit ici de ce peuple, il a ajouté : « C’est nous qui sommes sa maison », c’est-à-dire sa chose. Puis voici la supériorité de Jésus mise en pleine lumière : « Il a été jugé digne d’une gloire a d’autant plus grande que celle de Moïse, que « celui qui a bâti la maison est plus estimable que la maison même (3) ».
3. Et lui-même, dit-il, était de la maison. Il n’a pas dit : L’un était l’esclave, l’autre était le maître ; mais il l’a fait entendre discrètement. Si maison, veut dire ici peuple ; et si Jésus était du peuple, c’est qu’il était de la maison. Nous aussi nous avons l’habitude de dire : Voilà un homme qui est de la maison. Il dit ici « maison » et non pas « temple », car le temple avait été construit non par Dieu lui-même, mais par les hommes. Quant à celui qui l’a établi, c’est Dieu ; il est ici question de Moïse. Voyez comme la supériorité de Dieu est indiquée. Il était fidèle, dit-il, en toute sa maison, et il était de cette maison, c’est-à-dire du peuple. Or, l’ouvrier est plus estimable que l’ouvrage, et l’architecte que la maison. « Et l’architecte de toutes choses, c’est Dieu (4) ». Vous voyez qu’il est question ici du peuple tout entier ; et non du temple. « Quant à Moïse, il a été fidèle dans toute la maison de Dieu, comme un serviteur envoyé pour annoncer au peuple tout ce qu’il lui était ordonné de dire (5) ». Voilà encore une autre différente qui résulte de l’état de fils et de celui de serviteur. Voyez-vous comme par ce nom de fils il fait entendre que le titre de Fils de Dieu appartient à Jésus en toute propriété ? « Mais le Christ, comme Fils, a l’autorité dans sa maison (6) ». Voyez-vous comme il distingue et sépare l’œuvre de l’ouvrier, le serviteur du Fils ? Celui-ci entre dans le bien de son père, comme Fils de la maison, celui-là comme serviteur. « Et c’est nous qui sommes sa maison, pourvu que nous conservions jusqu’à la fin une ferme confiance et l’espoir glorieux des biens qui nous attendent ».
Ici, nouvelle exhortation à résister fortement, à ne pas tomber dans le découragement. Comme Moïse, dit-il, nous serons de la maison de Dieu, si nous conservons jusqu’à la, fin une – ferme confiance et un glorieux espoir. Celui que la douleur abat dans les épreuves et' qui sent son cœur défaillir, n’est pas glorifié ; celui qui ; tout couvert de confusion, va se cacher, n’a pas la confiance ; celui qui est triste n’est pas glorifié. Et plus c’est faire leur éloge que de dire : « Si nous conservons jusqu’à la fin une ferme confiance et l’espérance de la gloire qui nous attend ». C’est montrer que cette confiance et cet espoir sont déjà entrés dans leur cœur. Mais c’est jusqu’à la fin qu’il faut persévérer ; il faut savoir non seulement résister mais avoir une confiance ferme et stable fortement appuyée sur la foi, sans jamais se laisser ébranler par les épreuves. Ne vous étonnez pas si ce mot : « Il a été éprouvé lui-même », rappelle un peu trop la nature humaine. Si, en parlant du Père qui n’a pourtant pas été incarné, l’Écriture dit : « Le Seigneur a regardé du haut des cieux et il a vu tous les enfants des hommes » (Ps. 13,2) ; c’est-à-dire, il s’est rendu de toutes choses un compté fidèle et exact : si elle dit : « Je descendrai des cieux et je verrai si leurs plaintes sont légitimes » (Gen. 18,21) ; si elle dit : « Dieu ne peut supporter les vices des hommes », pour exprimer la grandeur de la colère divine, on peut parler à plus forte raison « des épreuves » du Christ dont la chair a connu la souffrance. Comme beaucoup d’hommes pensent que l’épreuve des maux est le meilleur moyen de les connaître, il veut montrer que celui qui a souffert, connait les souffrances de la nature humaine. « Vous donc, mes saints frères » (donc, c’est-à-dire par ce motif) vous qui avez part à la vocation céleste ». N’en demandez pas davantage, si vous êtes appelés à cette vocation voilà la récompense ! voilà la rémunération ! Écoutez ce qui suit : « Considérez l’apôtre et le pontife de notre confession dans la personne de Jésus-Christ qui est fidèle à celui qui l’a établi, comme Moïse lui a été fidèle en toute sa maison ». Que signifient ces mots : « Qui est fidèle à celui qui l’a établi ? » Ils signifient : qui pourvoit à tout, qui conduit les siens, qui ne les laisse ni errer au hasard ni s’égarer. « Comme Moïse, en toute sa maison », c’est-à-dire : Apprenez à connaître ce pontife et vous n’aurez pas besoin d’autre consolation, d’autre exhortation. Il l’appelle apôtre, parce qu’il a été envoyé ; il l’appelle pontife de « notre confession », c’est-à-dire de « notre foi ». Il a eu raison de dire : « Comme Moïse ». Car, comme lui, Jésus a été chargé de conduire et de gouverner son peuple ; mais sa mission était plus haute et plus importante. Moïse n’était qu’un serviteur ; le Christ est le Fils de Dieu. Celui-là avait sous sa tutelle des étrangers ; celui-ci est le tuteur des siens.
« Pour annoncer tout ce qu’il lui était ordonné de dire ». Que dites-vous, Paul ? Dieu accepte-t-il le témoignage des hommes ? Sans doute, il l’accepte. S’il prend à témoin le ciel, la terre et les collines, en disant par la bouche des prophètes « Cieux, entendez-moi ; terre, écoute ; car le Seigneur a parlé ; écoutez, vallées et fondements de la terre » (Is. 1,2 ; Mic. 6,2), parce que le Seigneur porte son jugement contre son peuple, à plus forte raison peut-il prendre les hommes à témoin. Que veulent dire ces mots : « Pour annoncer, pour rendre témoignage ? » C’est qu’il faut à Dieu des témoins contre des hommes qui ont abjuré la pudeur. « Le Christ gouverne comme Fils ». Moïse était tuteur d’enfants étrangers ; le Christ est le tuteur de sa famille. « Et la glorieuse espérance ». C’est bien dit : car les biens qui leur étaient promis n’étaient encore que des espérances.