Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/484

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Or il faut conserver l’espérance et nous glorifier de ces promesses, comme si elles s’étaient réalisées déjà. C’est pour cela qu’il parle « de l’espérance glorieuse » ; c’est pour cela qu’il ajoute : Conservons-la fermement jusqu’au bout ; car c’est l’espérance qui nous a sauvés. Si donc nous lui devons notre salut, et si nous savons attendre patiemment, ne nous affligeons pas des maux présents et ne cherchons pas à voir l’effet des promesses divines ; « car lorsque l’on voit ce qu’on a espéré, ce n’est plus espérance ». (Rom. 8,24) Ils sont grands les biens qui nous sont promis, et ce n’est point dans cette vie passagère et périssable que nous pouvons les goûter. Mais pourquoi donc alors nous prédire un bonheur qui ne doit pas être ici-bas notre partage ? C’est que Dieu, au moyen de cette promesse, veut ranimer notre âme, affermir et fortifier notre ardeur, relever et fortifier nos esprits. Voilà le but véritable de toutes ces promesses.
4. Gardons-nous donc de nous troubler ; n’éprouvons aucun trouble à l’aspect du bonheur des méchants ; ce n’est point ici-bas que le vice et la vertu sont rémunérés ; si cela arrive quelquefois, ce n’est pas pour que justice soit faite ; c’est un avant-goût du jugement, c’est pour que ceux qui ne croient pas à la résurrection rentrent en eux-mêmes. Quand donc nous voyons le méchant dans l’opulence, ne tombons pas dans le découragement ; quand nous voyons l’homme de bien dans le malheur, ne nous troublons pas ; c’est là-bas que sont les couronnes ; c’est là-bas, que sont les supplices. D’ailleurs, il est impossible que le méchant soit complètement méchant ; il peut avoir quelques qualités : il est impossible aussi que le bon soit parfait ; il peut avoir quelques défauts. Quand donc le méchant est dans la prospérité, c’est pour son malheur, sachez-le bien ; c’est pour qu’après avoir reçu ici-bas la récompense du peu de mérite qu’il peut avoir, il reçoive là-bas son châtiment plein et entier. Le plus heureux est celui qui est puni ici-bas de manière à sortir de cette vie éprouvé par la souffrance, pur et irréprochable, après avoir déposé le fardeau de ses péchés. Et c’est aussi ce que nous enseigne Paul, en ces termes : « C’est pour cela qu’il y a parmi vous bien des malades, bien des infirmes, et que beaucoup dorment du dernier sommeil » ; et ailleurs : « Livrez cet homme à Satan, pour mortifier sa chair, afin que son âme soit sauvée, au grand jour du jugement ». (1Cor. 5, 5) Et le Prophète dit : « Il a reçu de la main du Seigneur un double fardeau de péchés. » (Is. 11,2) Et David dit ailleurs : « Voyez mes ennemis ; ils se sont multipliés plus que les cheveux de ma tête, et ils me poursuivent de leur injuste haine ; pardonnez-moi tous mes péchés ». (Ps. 24,19, 18) Et nous lisons ailleurs:« Seigneur, notre Dieu, donnez-nous la paix ; car vous nous avez rendu tout le mal que nous avons fait ». (Is. 26,12) Voilà ce qui prouve que les bons expient ici-bas leurs péchés. Pour vous convaincre maintenant que bien des méchants favorisés ici-bas reçoivent dans l’autre vie un châtiment complet, écoutez ces paroles d’Abraham : « Vous avez reçu votre part de bonheur dans votre vie, et Lazare n’a eu que le malheur en partage ». (Lc. 16,25) De quels biens s’agit-il ici ? Ces mots : « Vous avez reçu votre part », montrent que le bonheur de l’un, comme le malheur de l’autre, était le paiement d’une dette. Aussi ajoute-t-il : « C’est pourquoi il est dans la consolation ». Car vous le voyez, il est purifié de ses péchés, « et vous » vous êtes dans les tourments.
Ne nous attristons donc pas, lorsque nous voyons les pécheurs favorisés ici-bas ; mais quand nous sommes dans le malheur, réjouissons-nous, car ce malheur est le paiement de nos fautes. Ne cherchons pas le repos ; car le Christ a promis l’affliction à ses disciples : et Paul dit : « Tous ceux qui, veulent vivre pieusement en Jésus-Christ, souffrent la persécution ». (2Tim. 3,12) Un courageux athlète, au moment du combat, ne, recherché pas les biens, les tables bien servies ; une pareille conduite n’est pas celle d’un athlète, mais celle d’un homme – mou et efféminé. Un athlète qui tombât est tout frotté d’huile, il supporte la poussière, la chaleur, la sueur, les perplexités, les angoisses de la lutte. Voici le moment du combat ; donc voici le moment des blessures, de l’effusion du sang ; de la douleur ! Écoutez les paroles de saint Paul : « Je ne combats pas en lutteur qui frappe dans le vide ». (1Cor. 9,26) Songeons que notre vie n’est qu’un combat et jamais nous ne chercherons le repos ; jamais nous ne regarderons l’affliction comme un accident nouveau et extraordinaire de notre existence ; nous ressemblerons à l’athlète qui ne regarde pas la lutte comme un accident ; nouveau et extraordinaire pour lui. Il n’est pas temps encore de nous reposer ; il faut que nous soyons perfectionnés parla souffrance. Quoique ;, nous ne soyons pas en butte à la persécution, aux, vexations, il y a cependant des afflictions journalières qui nous éprouvent ; si nous ne savons pas les supporter, comment supporterions-nous la persécution ? « Vous n’avez eu », dit-il, « que des persécutions humaines ». (1Cor. 10,13) Ainsi prions Dieu de ne pas subir la persécution ; mais si nous la subissons, sachons la supporter avec courage. Il appartient au sage qui sait garder une, juste mesure, de ne pas se jeter à la légère dans le péril ; mais il appartient à l’homme courageux, au philosophe de se raidir contre le péril, quand il y tombe. N’allons donc pas nous y jeter légèrement ;, il y aurait là une audace téméraire, mais, quand nos chefs, quand les circonstances nous appellent, ne reculons pas, il y aurait là de là lâcheté. En un mot, ne courons pas au danger en téméraires, sans cause, sans profit, sans une pieuse nécessité ; il y aurait de l’ostentation, un amour de la gloire vain et superflu. Mais pour défendre la religion, bravons mille morts, s’il le faut. N’appelez pas les persécutions, si votre piété ne rencontre rien qui l’arrête. À quoi bon attirer sur vous des dangers superflus et inutiles ?
5. Ce qui me dicte ce langage, c’est le désir que j’ai de vous voir observer les lois du Christ qui nous ordonne de prier Dieu, de ne pas entrer en