Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/488

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point entrés à cause de leur incrédulité (6), Dieu n détermine encore un jour particulier qu’il appelle aujourd’hui, en disant tant de temps après par David, ainsi que je viens de dire (7) ». Que veut-il dire ici ? Puisque, dit-il, quelques élus doivent entrer dans le repos de Dieu et que les anciens Hébreux n’y sont pas entrés, voici une troisième espèce de repos qu’il établit. Mais comment prouve-t-il que certains élus doivent entrer dans ce repos de Dieu ? Écoutons-le : « C’est que », dit-il, « après tant d’années », voilà David qui répète : « Aujourd’hui, si vous entendez sa voix, n’endurcissez pas vos cœurs, comme aux jours de sa colère. Car, si Jésus les avait établis dans ce repos, l’Écriture n’aurait jamais parlé, après cela, d’un autre jour (6) ». Ce langage est clair et nous fait entrevoir quelqu’autre récompense. « Il y a donc encore un sabbat réservé au peuple de Dieu (9) » ; d’où résulte cette conclusion, ce précepte : « N’endurcissez pas vos cœurs ». Car si un sabbat n’existait pas, et s’ils n’étaient pas exposés à subir les mêmes châtiments, à quoi bon ce précepte, à quoi bon cette recommandation de ne pas retomber dans les mêmes fautes, pour ne pas retomber dans le même abîme de souffrances ? Et comment ceux qui étaient en Palestine pouvaient-ils subir les mêmes supplices, s’il n’y avait pas encore un repos ?
3. C’est bien conclure que d’employer le mot de « sabbat », et non celui de « repos'», que d’employer ici le nom du jour où le peuple de Dieu courait se réjouir. Le sabbat, selon l’apôtre, c’est le royaume des cieux. Au jour du sabbat, les Hébreux doivent, se garder de tout péché, ils ne doivent songer qu’à adorer Dieu, comme faisaient les prêtres ; ils ne doivent songer qu’aux œuvres spirituelles. Voilà quelle doit être leur occupation au jour du sabbat : voilà quelle sera l’occupation des élus dans le royaume des cieux. Paul n’a pas précisément tenu ce langage, mais voici ce qu’il a dit : « Celui qui est entré dans le repos de Dieu se repose aussi lui-même, en cessant de « travailler, comme Dieu s’est reposé après ses ouvrages (10) ». Dieu, dit-il, s’est reposé après ses ouvrages, et l’homme qui est entré dans le repos de Dieu, se repose comme lui ; il leur parlait du repos, et ils voulaient savoir quand ce repos aurait lieu. Il répond donc à leurs désirs, en finissant.
Quant à ce mot « aujourd’hui », il le leur dit pour les sauver du désespoir. Exhortez-vous les uns les autres, dit-il, exhortez-vous chaque jour, tant que vous pouvez dire : « Aujourd’hui ». Cela veut dire que le pécheur même, tant qu’il peut dire « aujourd’hui », doit espérer. Loin de nous le désespoir, tant que nous vivons ! Veillons seulement, dit-il, à ce que notre cœur ne soit jamais en proie à l’incrédulité. Et encore, si cela arrive, ne nous désespérons pas ; mais ranimons-nous. Tant que nous sommes de ce monde ; tant que nous pouvons dire a aujourd’hui », nous avons du temps devant nous. Dans ce passage, il parle non seulement de l’incrédulité, mais des murmures. « Des murmures de ces hommes dont les cadavres sont étendus dans le désert ». (Héb. 3,17) Puis, pour que ses auditeurs n’aillent pas s’imaginer que le châtiment du coupable se bornera à la privation du repos, il met devant leurs yeux le supplice gui lui est réservé et il ajoute : « La parole de Dieu est vivante et efficace, et elle perce plus qu’une épée à deux tranchants ; elle pénètre jusque dans les replis de l’âme et de l’esprit, jusque, dans les jointures et la moelle des os ; et elle démêle les pensées et les mouvements du cœur (12) » ; c’est du supplice de la géhenne qu’il parle ici. C’est un supplice, dit-il, qui pénètre jusque dans les replis de notre cœur et qui dessèche notre âme. Il ne s’agit point ici de cadavres étendus dans le désert, sans sépulture ; ils ne sont pas privés de la terre ; ils sont privés du royaume des cieux ; ils sont livrés pour toujours à la géhenne ; ils sont livrés à une peine, à un supplice qui n’aura pas de fin.
Mais exhortez-vous les uns les autres ». (Héb. 3,13) Remarquez la douceur de ce langage. Il ne dit pas : Adressez-vous des réprimandes, mais exhortez-vous les uns les autres. C’est ainsi que nous devons nous comporter envers ceux que le chagrin accable : c’est ce qu’il dit dans sa lettre aux habitants de Thessalonique : « Donnez des avis à ceux dont l’âme est inquiète ». Quant aux esprits pusillanimes, voici ce qu’il dit : « Consolez ceux qui ont l’esprit abattu ; supportez les faibles ; soyez patients envers tous ». (1Thes. 5,14) Que veut dire ce mot « consolez ? » Il veut dire : Ne les faites pas tomber dans le désespoir ; ne leur faites pas perdre courage ; car ne pas consoler l’homme que l’affliction accable, c’est le jeter dans l’endurcissement. Il ne faut pas, dit-il, que vous vous endurcissiez, dans les pièges du péché. Les pièges du péché sont peut-être les pièges du démon, car c’est tomber dans le piège et l’erreur que de ne rien attendre de l’avenir, que de croire que nous n’avons pas de comptes à rendre ; que nous n’expierons pas nos fautes, que nous ne ressusciterons pas un jour. Une erreur encore, c’est l’indifférence ou le désespoir. Une erreur c’est de tenir ce langage : J’ai péché et il n’y a plus d’espoir pour moi. Puis il les fait espérer en leur disant : « Nous sommes entrés dans la participation de Jésus-Christ ». (Héb. 3,14) C’est comme s’il leur disait : Celui qui nous a assez aimés, celui qui nous a assez estimés pour se revêtir de notre chair, ne nous laissera pas, périr. Réfléchissons, dit-il, à l’honneur qu’il a daigné nous faire. Le Christ et nous, nous ne faisons qu’un ; gardons-nous donc de ne pas croire en lui.
Et il revient encore sur ce qu’il a dit ailleurs : « Si nous souffrons avec lui, nous régnerons avec lui » (2Tim. 2,12), c’est-à-dire : Nous sommes entrés en « participation avec lui », en participation des biens du Christ. Après avoir exhorté ses auditeurs par ces paroles qui leur montrent la récompense et le prix, après nous avoir dit : « Nous sommes entrés en participation avec le Christ », il les exhorte, en les affligeant et en les inquiétant : « Craignons », dit-il, « que négligeant la promesse qui nous est faite d’entrer dans le repos de Dieu, il n’y ait quelqu’un d’entre nous