Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/504

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ce pas là un mot qui s’envole aussitôt qu’on le prononce ? Et certes, la chose a le même sort que le mot. Le consul ne fait que paraître, et il n’est déjà plus. Donnons à ce dignitaire un ou deux ans, trois ou quatre ans, pour rester consul… c’est bien assez. Car où trouver des hommes qui aient été consuls pendant dix ans ? Mais il n’en est pas ainsi de Paul. Tant qu’il a vécu, sa splendeur n’a pas été cette splendeur éphémère qui brille un ou deux jours, qui s’éclipse au bout de dix, de vingt ou de trente jours, qui s’efface au bout de dix ans, de vingt ans ou de trente ans. Quatre cents ans ont déjà passé sur sa cendre, et aujourd’hui il est plus illustre encore et bien plus illustre que de son vivant. Et je ne parle ici que de sa gloire terrestre ; car la gloire dont il est revêtu dans les cieux, quelle bouche pourrait l’exprimer ? Aspirons donc, je vous en prie, à cette gloire céleste ; tâchons de l’obtenir ; car c’est la seule gloire véritable. Laissons de côté les biens de cette vie, pour trouver grâce et miséricorde devant Jésus-Christ Notre-Seigneur, auquel, conjointement avec le Père et le Saint-Esprit, gloire, honneur, puissance et adoration, maintenant et toujours, et dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

HOMÉLIE X.


LORSQU’UNE TERRE, SOUVENT ARROSÉE PAR LA PLUIE, PRODUIT DES HERBAGES UTILES A CEUX QUI LA CULTIVENT, ELLE REÇOIT LA BÉNÉDICTION DE DIEU ; MAIS QUAND ELLE NE JETTE QUE DES ÉPINES ET DES RONCES, C’EST UNE TERRE RÉPROUVÉE QUI EST MENACÉE DE LA MALÉDICTION DU SEIGNEUR, ET A LAQUELLE IL FINIT PAR METTRE LE FEU. (VI, 7, 8, JUSQU’À-12)

Analyse.

  • 1. La terre dont il est question dans le septième et dans le huitième verset du chapitre VI, c’est l’âme humaine ; la pluie, c’est 1a doctrine céleste. – La crainte du Seigneur ne doit pas abandonner nos âmes.
  • 2. En méditant les paroles du verset 8, on voit que Dieu laisse jusqu’à la fin la porte du salut ouverte au repentir, et que lest à la persistance dans le mal qu’il réserve ses terribles châtiments.
  • 3. Paul, en parlant aux Hébreux, sait mêler, dans de justes proportions, l’éloge et le blâme. Il rappelle aux Hébreux leur passé ; il leur cite l’exemple d’Abraham.
  • 4. La charité du chrétien ne doit avoir rien de mesquin ni d’étroit. – Elle doit s’étendre aux laïques comme aux religieux, aux païens comme aux fidèles. – Il serait honteux pour lui de rester, en fait de charité, au-dessous du bon samaritain.


1. Écoutons avec crainte la parole de Dieu ; écoutons-la avec crainte et avec une crainte profonde. « Servez Dieu avec crainte », dit le Psalmiste, « et réjouissez-vous devant lui avec terreur ». (Ps. 2,11) Or, si notre joie et notre allégresse doivent être mêlées de terreur, que sera-ce donc quand nous entendrons des paroles, comme celles de ce chapitre, et quel châtiment ne méritons-nous pas si nous écoutons ces paroles sans émotion ? Après avoir dit que l’homme devenu pécheur après le baptême, ne peut en recevoir un second et obtenir, par ce second baptême, la, rémission de ses péchés, l’apôtre ajoute aussitôt : « Lorsqu’une terre, souvent arrosée par la pluie produit des herbages utiles à ceux qui la cultivent ; elle reçoit la bénédiction de Dieu. Mais, quand elle ne jette que des épines et des ronces, c’est une terre réprouvée qui est menacée de la malédiction du Seigneur, et à laquelle il finit par mettre le feu » : Tremblez donc, ô mes chers frères. Ces paroles menaçantes ne sont ni celles de saint Paul, ni celles d’un homme ; ce sont celles de l’Esprit-Saint, ce sont celles du Christ qui emprunte la voix de l’apôtre. Où trouver ces âmes qui ressemblent à des champs sans épines ? Quand nous serions tout à fait purs, il ne faudrait pas encore avoir, trop de confiance. Nous devrions toujours craindre, nous devrions toujours trembler de sentir les épines germer dans nos âmes. Mais, quand nous sommes au dedans tout hérissés d’épines, et de ronces, d’où nous vient tant de confiance, je vous le demande ? Pourquoi tant de paresse et tant de lenteur ? Quand on est debout, on doit craindre de tomber. « Que celui qui est debout prenne garde de tomber, dit saint Paul ». (1Cor. 10,12) À plus forte raison, quand on est tombé, on doit avoir peur de ne plus pouvoir se relever. Si Paul, ce prédicateur de la foi, cet homme juste craint d’être réprouvé (1Cor. 9,27) ; nous qui sommes – des réprouvés en effet, quel pardon pouvons-nous attendre, quand nous né craignons pas Dieu, quand nous remplissons nos devoirs de chrétiens par routine et à la légère ? Tremblons donc, ô mes chers frères « car Dieu manifeste sa colère du haut des cieux ». (Rom. 1,18) Cette colère éclate non seulement contre l’impiété, mais contre toute iniquité grande et petite.
Puis saint Paul fait allusion à la bonté de Dieu et à sa clémence. Cette pluie dont il nous-parle, c’est la doctrine céleste. Par ce seul mot, il rappelle ce, qu’il a dit plus haut : « Vous devriez déjà être des maîtres ». Dans maints passages de l’Écriture on rencontre cette comparaison de la doctrine céleste avec une pluie féconde. « J’ordonnerai aux nuages », dit le Seigneur, « de ne pas laisser tomber la pluie sur cette vigne ». (Is. 5,6)