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HOMÉLIE XXXII.


VOUS NE VOUS ÊTES PAS APPROCHÉS MAINTENANT D’UNE MONTAGNE SENSIBLE ET TERRESTRE, NI D’UN FEU BRÛLANT, D’UN NUAGE OBSCUR ET TÉNÉBREUX, DES TEMPÊTES, ETC. (CHAP. 12,18-20).

Analyse.

  • 1 et 2. Caractère de la loi antique : majestueuse terreur qui accompagne la promulgation de la loi, et fait trembler le peuple et Moïse lui-même. – Sens mystérieux et symbolique de cet appareil déployé au mont Sinaï. – Raison de chaque circonstance. – La loi nouvelle plus grande, bien que plus accessible. – Circonstances qui l’accompagnent et qui se révéleront surtout dans les splendeurs de l’éternité.
  • 3. Le monde passe, le sol tremble ; nous passons plus vite encore que ce monde si menacé : bâtissons ailleurs une maison permanente, dont les pauvres, assistés par nous, seront les constructeurs. – L’aumône est comparée à une reine qui entre librement dans le ciel, à la colombe dont Dieu admire la beauté ; à l’aigle endormi au pied du trône royal, et qui nous protège contre le jugement de Dieu. – L’aumône est un devoir, puisque Dieu nous a fait miséricorde à nous-mêmes. – D’ailleurs, toujours possible, elle peut offrir le denier de la veuve aussi bien et mieux que l’or du riche. – Offrande des chevelures pour le temple.


1. Il était vraiment grand et terrible, ce Saint des Saints qu’abritait l’ancien temple ; terrible avait été de même l’appareil déployé au mont Sinaï, ce feu, ces ténèbres, cette sombre nuée, cette tempête dont l’Écriture a dit que le Seigneur se montra sur le Sinaï au milieu des flammes, de la tempête et des nuées épaisses. Le Nouveau Testament ne fut publié avec aucune circonstance semblable ; Dieu le donna simplement par la parole. Voyez toutefois comme l’apôtre compare le cortège même extérieur des deux alliances ; et comme, avec raison, il donne tout l’avantage des circonstances mêmes à notre sainte loi. Déjà, quant au fond même, il a surabondamment prouvé, il a évidemment démontré la différence des deux Testaments, et la réprobation de l’Ancien ; dès lors, quant aux circonstances mêmes, il arrive à les juger facilement. Or, que dit-il ?
« Vous n’avez pas approché, en effet, aujourd’hui, au pied d’une montagne visible, auprès d’un feu ardent, d’un tourbillon, d’une sombre nuée, d’une tempête ; vous n’avez pas entendu le son de la trompette et le retentissement des paroles, que ceux qui les entendirent refusèrent d’écouter, en suppliant que la voix n’ajoutât pas un mot de plus. Car il ne pouvait supporter la rigueur de cette menace : Si une bête même touche la montagne, elle sera lapidée (18-20) » : Terrible appareil, dit l’apôtre, si terrible même, qu’Israël ne put se résigner à en être témoin et qu’aucun animal même n’osa gravir la montagne. Mais toutes ces circonstances redoutables n’étaient pas comparables à celles que l’avenir devait révéler. En effet, qu’est-ce que le Sinaï comparé au ciel ? Qu’est-ce que ce feu sensible en comparaison du Dieu qui échappe à nos sens ? Car notre Dieu à nous, dit l’Écriture, est un feu dévorant. – « Que Dieu ne nous parle pas, criait ce peuple ; que ce soit plutôt Moïse qui nous parle ». (Ex. 9,19) « Car ils ne pouvaient supporter », dit l’apôtre, « ce terrible arrêt : Qu’une bête même qui touchera la montagne, soit lapidée ; et le spectacle qui s’offrait était si terrible, que Moïse dit lui-même : Je suis tout tremblant et tout effrayé (21) ». Étonnez-vous encore que l’Écriture attribue au peuple ce même sentiment, lorsque le législateur même qui avait pénétré dans la nuée sombre où Dieu habitait, s’écriait à son tour : Je suis effrayé et tout tremblant !
« Mais vous vous êtes approchés de la montagne de Sion, de la ville du Dieu vivant, de la Jérusalem céleste, d’une troupe innombrable d’anges, de l’Église des premiers-nés qui sont écrits dans le ciel, de Dieu qui est le juge de tous, des esprits des justes qui sont dans la gloire ; de Jésus qui est le médiateur de la nouvelle alliance, et de ce sang dont l’aspersion parle plus avantageusement que le sang d’Abel (22-24) ».
Vous voyez par quels traits il montre la supériorité de la nouvelle alliance à l’égard de l’ancienne. – Au lieu de la Jérusalem terrestre, la céleste Jérusalem : vous vous êtes approchés, vous, de la cité du Dieu vivant, de la Jérusalem céleste. – Au lieu de Moïse, Jésus : Jésus, dit-il, est le médiateur de la nouvelle alliance. – Au lieu du peuple israélite, les anges : L’innombrable multitude des anges, dit-il. – Mais, quels premiers-nés désigne-t-il par l’expression : L’Église des premiers-nés ? Il entend tous les chœurs des fidèles, qu’il appelle aussi les esprits des justes parfaits. Ainsi, poursuit-il, ne vous livrez pas au chagrin ; voilà ceux avec qui vous serez un jour.
Mais quel est le sens de la phrase : « De ce sang dont l’aspersion parle plus avantageusement que celui d’Abel ? » Le sang d’Abel a-t-il donc parlé ? Certainement, répond-il, et comment ? Paul encore vous le dit : « C’est par la foi qu’Abel offrit à Dieu une hostie plus excellente que celle de Caïn, et que grâce à cette victime, il fut déclaré juste ; c’est à cause de sa foi, qu’il parle encore après sa mort ». Dieu lui-même le dit : « La voix du sang de ton frère crie jusqu’à moi ». Tel est donc le sens du texte, à moins qu’on ne lui donne celui-ci : le sang d’Abel est encore célébré dans le monde, mais bien moins toutefois que celui de Jésus-Christ. Car le sang divin a purifié le monde,