ils les favorisent ; loin de faire la guerre aux voleurs, ils sont de connivence avec eux, et courent à une perversité entièrement opposée à la vertu des princes. « Aiment les présents. » Voici encore un nouveau vice engendré par l’amour de l’argent, vice qui, sous une apparence honnête, sous les dehors de la bienveillance, cache l’avarice la plus sordide. « Ne cherchent que le gain. » Gardent rancune à leurs ennemis, s’empressent de rendre le mal pour le mal, espèce de péché très-grave. Aussi et le Nouveau et l’Ancien Testament mettent-ils tous leurs soins à le réprimer. « Que nul, est-il dit, ne forme dans son cœur de mauvais desseins contre son frère. » (Zac. 7,10) Car il faut que le peuple et à plus forte raison le prince soit pur de toute inimitié, lui qui doit avertir ses sujets de déposer en justice toute haine privée, de peur que le port ne devienne un écueil. « Ne rendent point justice aux orphelins. » C’est-à-dire ne les aident pas à obtenir justice. « Et la cause de la veuve n’a point d’accès auprès d’eux. »
Remarquez que le Prophète signale comme un mal non seulement de faire de mauvaises actions, mais encore de ne pas en faire de bonnes, doctrine que nous retrouvons dans le Nouveau Testament. Car ceux qui n’ont pas nourri le pauvre dévoré par la faim, quoiqu’ils n’aient pas enlevé le bien d’autrui, mais uniquement parce qu’ils n’ont pas donné leurs biens à ceux qui étaient dans le besoin, sont envoyés au feu de l’enfer ; de même le Prophète blâmé les princes de Sion non de ce qu’ils sont ou avares ou tyrans, mais de ce qu’ils n’accordent pas leur protection à ceux qui en ont besoin. « Aussi voici ce que dit le Maître, le Seigneur des armées, le Fort d’Israël », c’est-à-dire du peuple. Ce n’est pas sans motif qu’il emploie ce terme, le Fort, mais bien pour leur rappeler les bienfaits qu’ils ont obtenus contre toute espérance et les châtiments terribles qu’ils ont endurés ; comme après avoir souvent et beaucoup péché, après avoir éprouvé la longanimité de Dieu, ils sont tombés dans la mollesse, il veut leur montrer que Dieu peut se venger quand il lui plaît, qu’il n’a pas besoin de temps favorables, de circonstances opportunes, que tout est sous sa main et à sa disposition. « Malheur à ceux qui commandent en Israël ! ma fureur contre mes ennemis n’aura pas de fin. » Quoi de plus malheureux que ceux qui ont Dieu pour ennemi ! « N’aura plus de fin », dit-il, non qu’il veuille les jeter dans le désespoir, mais pour qu’une crainte plus fortement imprimée les amène au repentir. Car ces mots « ma fureur n’aura point de fin », sont moins terribles que ceux-ci, « contre mes ennemis. » Il n’y a rien qui irrite Dieu, comme l’injustice faite aux pauvres. « Malheur à ceux qui commandent ! » dit-il, non pour condamner tout pouvoir, mais le pouvoir qui fait le mal. La force dont il parle ici ce n’est pas la force du corps, mais la force que donnent les circonstances. « Et je ferai justice de mes adversaires. » Je punirai mes ennemis : il appelle ses ennemis les ennemis des pauvres, ceux qui les maltraitent ; et il se sert de cette expression pour montrer la grandeur du méfait. « J’appesantirai ma main sur vous et je vous purifierai par le feu (25). » Apprenez de là que la colère et la vengeance de Dieu, quelles qu’elles soient, n’ont pas pour but le mal et la punition, mais l’amendement de ceux même qui sont châtiés. « Et je vous purifierai, dit-il, par « le feu. » Ce n’est donc pas quand nous sommes punis, c’est quand trous péchons qu’il faut pleurer, puisque dans le second cas nous nous souillons, tandis que dans le premier nous nous purifions. Quelle est la vertu de cette purification ? De faire qu’il n’y ait plus en vous trace de souillure ; car ce que le feu est à l’or, la punition l’est aux pécheurs. « Ceux qui désobéiront, je les perdrai, j’enlèverai du milieu de vous tous les impies et j’humilierai tous les superbes. » Les incorrigibles, veut-il dire, et ceux qui ne céderont pas auto châtiments, je les perdrai. Que sert qu’ils vivent puisqu’ils n’emploient leur vie qu’à procurer le mal et d’eux-mêmes et des autres ? Et ceux que le châtiment de ces endurcis pourra rendre meilleurs resteront. Il me semble qu’il fait ici allusion à la captivité. « Et je rétablirai vos juges comme ils étaient autrefois, et vos conseillers comme ils étaient dans le principe. »
9. Ici il annonce le retour. Quand les incorrigibles auront disparu, et que ceux qui sont capables de s’améliorer seront devenus meilleurs, il montre (et c’est le moment) comment il achèvera la guérison ; ce sera en donnant de bons chefs et de bons conseillers, afin que, tout le corps ayant ressenti l’effet des remèdes et de bons médecins continuant leurs soins, tous les membres reviennent de toutes parts à la santé. Ce n’est pas un léger bienfait que de
Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/360
Apparence
Cette page n’a pas encore été corrigée