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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/83

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les places publiques, ni dans les banquets : à l’un les honneurs, à l’autre le mépris ; à l’un, pleine liberté de parole, à l’autre la réserve timide, « car la sagesse du pauvre est comptée pour rien, et ses discours ne sont pas écoutés. » (Qo. 9,16) Le riche parle, et on l’approuve : le pauvre ouvre la bouche, et on ne lui permet pas de parler. Mais ici il n’en est pas de même. Je ne tolère pas dans l’Église ces folles prétentions, mon enseignement est commun à tous.
Voyez l’habileté du Prophète, comment, avant même de commencer sa harangue, il fait pressentir par son seul appel, la vaste étendue de ses enseignements. Car en appelant tous les hommes ensemble, il ne permet ni à l’un de s’enorgueillir, ni à l’autre de s’humilier, mais il leur montre que la richesse n’est pas plus un bien que la pauvreté n’est un mal, mais que ce sont des accessoires empruntés au monde extérieur. Et que m’importe que tu sois ceci ou cela. Je ne vois pas que toi, riche, tu aies plus que le pauvre, et que le pauvre ait moins que toi. Mais peut-être dira-t-on. Et toi qui n’es qu’un homme et qui participes de la, même nature que nous, d’où vient que tu as de toi une si bonne opinion que tu t’imagines être capable d’instruire toute, la terre, et que tu appelles à toi tous les hommes des extrémités de ta terre ? Tes paroles sont-elles donc dignes d’une telle assemblée ? – Oui, répond-il. Car après avoir convoqué tous les hommes, écoutez ce qu’il dit pour qu’on ajoute foi à ses paroles : « Ma bouche proférera des paroles de Sagesse, et la méditation de mon cœur des paroles de prudence (4). » Un autre : « et mon cœur fredonnera des paroles de prudence », ce que le texte hébreu rend par « ovagith. » Voyez-vous comme son discours va droit au but ? Je ne parlerai ni des richesses, dit-il, ni des dignités, ni de la puissance, ni de la force du corps, ni d’aucune autre chose périssable c’est de la sagesse que je vais parler, j’en parlerai consciencieusement, et non pas à la légère, en homme qui ne la connaît que d’hier. « Je prêterai l’oreille pour entendre la parabole (5). » Un autre : « Je prêterai l’oreille à la parabole », ce que le texte hébreu rend par « Lamasal. Je découvrirai sur la harpe ce que j’ai à proposer. » Un autre : « l’énigme que j’ai à proposer ; – Idathei », en hébreu.
Comment relier ces phrases aux précédentes ? Ce n’est plus un maître, c’est un disciple que je vois. Tu nous as appelés, ô Prophète, pour nous faire entendre d’utiles leçons, et après que nous sommes tous arrivés, que nous sommes tous réunis, après nous avoir prévenus que tu allais prononcer de sages paroles, voilà que tu quittes, sans avoir rien dit encore, le rôle de maître pour celui de disciple. – N’a-t-il pas dit en effet : « Je prêterai l’oreille pour entendre la parabole ? » Pourquoi cela ? – Pourquoi ? parce qu’il est vraiment habile, et qu’il veut mettre de la suite entre ses paroles. Après avoir dit : « Je proférerai des paroles de sagesse », afin qu’on ne croie pas que ses paroles sont simplement celles d’un homme, et : « la méditation de mon cœur des paroles de prudence », afin qu’on ne le soupçonne pas d’avoir inventé ce qu’il veut avancer, il montre par ces réflexions que ses paroles viennent de Dieu, qu’il ne dit rien qui lui appartienne en propre, et qu’il ne fait que répéter ce qu’il a entendu dire. J’ai prêté l’oreille, dit-il, aux paroles de Dieu, je les ai entendues, et je ne fais que vous révéler la communication qui m’est venue d’en haut. Ce qui faisait dire à Isaïe : « Le Seigneur me donne une langue savante quand je dois parler : de plus il m’a donné des oreilles capables de l’entendre. » (Is. 50,4) Paul à son tour a dit : « La foi vient de ce qu’on a ouï ; et on a ouï parce que la parole de Jésus-Christ a été prêchée. » (Rom. 10,17) Vous le voyez, il a été disciple avant d’enseigner. Aussi un autre interprète a-t-il dit : « et mon cœur fredonnera. » Que signifie ce mot fredonnera ? Il chantera, il récitera un psaume inspiré par le Saint-Esprit. S’il parle de méditation, n’en soyez pas troublé : il a constamment médité et repassé en lui-même les paroles de l’Esprit-Saint, et ce n’est qu’après cela qu’il les a communiquées aux autres hommes. Pourquoi parle-t-il de parabole ? Voilà un mot qui a bien des significations. La parabole est une causerie, un exemple, un reproche, comme quand on dit : « Tu nous as fait devenir la fable des nations, et les a peuples secouent la tête en nous regardant. » (Ps. 43,15) La parabole est encore un discours énigmatique, ce que beaucoup appellent une question à deviner, qui contient bien un sens, mais dont les paroles sont obscures et renferment une pensée cachée, comme lorsque Samson dit : « La nourriture est sortie de celui qui mangeait, et la douceur est sortie du fort (Jug. 14,14) », et Salomon : « Il