Page:Chtchédrine - Trois contes russes.djvu/62

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s’approprier et à tout dévorer renaissait en lui.

« Hé, hé, maintenant vous ne m’échapperez pas, mes bons amis ! » s’écria-t-il en se frottant les mains, et il endossa promptement son paletot afin de retourner en toute hâte au marché. Mais, ô miracle ! à peine avait-il achevé de mettre ce vêtement que son élan s’arrêta net. Il s’était formé en lui comme deux hommes, l’un, sans paletot, impudent et dépourvu de délicatesse, l’autre, avec paletot, timide et modeste.

Bien qu’il se sentît animé des sentiments les plus bienveillants, il n’abandonna pas son projet de retourner au marché.

« Peut-être, pensait-il, parviendrai-je à surmonter mon mal. »

Mais plus il approchait du marché, plus son cœur battait et plus il éprouvait le besoin de témoigner quelque amitié à