Page:Cicéron - Œuvres complètes, Garnier, 1850, tome 2.djvu/690

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ont pu saisir, ils les ont massacrés en pleine paix ; ils ont anéanti, autant qu’il était en eux, le nom des citoyens romains.

XXVI. Viendront-ils donc vanter leurs services dans une ville qu’ils détestent ? devant des hommes qu’ils ne voient qu’à regret, dans une république qu’ils auraient anéantie, s’ils en avaient eu la force comme ils en avaient la volonté ? Qu’ils regardent ces députés d’élite qui rendent témoignage en faveur de Flaccus, ces députés de la véritable Grèce ; qu’alors ils s’examinent, qu’ils se comparent à eux ; qu’alors ils préfèrent, s’ils l’osent, leur dignité à celle de ces peuples.

Voici les députés d’Athènes, de cette ville où l’on croit que les sciences, les lettres, les arts, l’agriculture, les cérémonies de la religion, les formes de la justice et les lois ont pris naissance, et de là se sont répandus sur toute la terre ; cette ville, dont les dieux mêmes, dit-on, se sont disputé la possession pour sa beauté ; dont l’antiquité a fait dire qu’elle a engendré elle-même ses citoyens, en sorte qu’elle est appelée à la fois leur mère, leur nourrice, leur patrie ; cette ville qui jouit d’une telle célébrité, que le nom de la Grèce, déchu et tombé presque entièrement, ne se soutient plus que par la gloire d’Athènes. Voici les députés de Lacédémone, de ce peuple connu et fameux par ses exploits, où les citoyens apportent en naissant une bravoure que l’éducation fortifie ; de ce peuple qui, seul dans l’univers, depuis plus de sept cents ans, conserve fidèlement ses lois et ses mœurs. Voici une foule de députés de toute l’Achaïe, de la Béotie, de la Thessalie, ces régions où naguère Flaccus commandait en qualité de lieutenant sous le général Métellus.

Je ne vous oublie pas, ô Marseille, vous qui avez connu Flaccus comme guerrier et comme questeur ; vous dont les mœurs et les solides vertus sont à mes yeux préférables à tout ce qu’on voit, je ne dis pas dans la Grèce, mais peut-être chez tous les peuples ; vous, dont la république, dans un tel éloignement des contrées, des connaissances et du langage de la Grèce, placée à l’extrémité du monde, entourée de nations gauloises, battue, pour ainsi dire, des flots de la barbarie, est si bien gouvernée par la sage politique de ses chefs, qu’il est plus facile de louer que d’imiter ses institutions. Voilà les témoins de Flaccus ; voilà ceux qui rendent hommage à son désintéressement : à des Grecs passionnés, nous opposons des Grecs irréprochables.

XXVII. Toutefois, pour peu qu’on ait voulu s’instruire dans cette partie de l’histoire, ne sait-on pas qu’il n’y a que trois sortes de Grecs véritables ? Les uns sont les peuples d’Athènes, Ioniens d’origine ; les autres étaient appelés Éoliens ; les troisièmes, Doriens. Toute cette Grèce qui a rendu son nom célèbre, qui s’est distinguée par sa politesse, par son génie, par tous les genres de talents, même par l’étendue de sa puissance et la gloire de ses armes, n’occupe, comme vous savez, Romains, et n’a toujours occupé qu’une petite partie de l’Europe. Après avoir conquis les côtes maritimes de l’Asie, elle les a entourées d’une ceinture de villes, moins pour fortifier cette région par des colonies, que pour la tenir sous son autorité. Ainsi donc, témoins asiatiques, quand vous voudrez vous faire une idée juste du crédit que vous apportez au tribunal, examinez les différentes contrées de l’Asie, et songez, non à ce