lieu, de quelle espèce de conclusion il faut faire usage : c’est la dernière des six parties du discours.
Nous cherchons donc d’abord comment il convient de traiter chaque cause ; et nous examinerons avant tout la cause conjecturale, qui est la première et la plus difficile. Dans cette cause, la narration de l’accusateur doit être entremêlée de soupçons semés partout ; aucun acte, aucune parole, aucune démarche, rien enfin ne doit y paraître manquer d’intention. La narration du défenseur doit présenter un exposé simple et lucide qui puisse affaiblir le soupçon. Six moyens différents constituent l’ensemble de cet état de cause, les probabilités, les convenances, les indices, l’argument, les suites, les preuves. Montrons quelle est la valeur de chacun d’eux. Par les probabilités, on fait voir que l’accusé avait intérêt au crime, et que jamais il ne fut éloigné d’une semblable turpitude ; ce qui divise la discussion en deux parties, la cause du crime et la conduite de l’accusé. La cause du crime, c’est ce qui pousse à le commettre, par l’appât d’un avantage ou pour éviter un désagrément. L’on cherche alors quel intérêt a rendu l’accusé coupable ; si c’est la soif des honneurs, de la fortune, ou du pouvoir ; s’il voulait assouvir son amour ou quelque autre passion de ce genre ; ou bien s’il échappait à quelque dommage, à des inimitiés, à l’infamie, à la douleur, au supplice.
III. L’accusateur, s’il s’agit de l’espoir d’un avantage, montrera l’avidité de celui qu’il attaque ; il exagérera ses craintes, si c’est un mal qu’il a voulu fuir. Le défenseur au contraire soutiendra, s’il le peut, que les motifs n’existaient pas, ou du moins il en affaiblira singulièrement le pouvoir. Ensuite il ajoutera qu’il est injuste de soupçonner d’une mauvaise action tous ceux qui pouvaient en retirer quelque avantage. Puis viendra l’examen de la conduite du prévenu par ses actes précédents. L’accusateur devra considérer d’abord s’il ne s’est pas déjà rendu coupable de quelque fait de ce genre ; s’il n’en trouve aucun, il cherchera s’il n’a pas donné lieu quelquefois à de semblables soupçons ; et s’attachera, dans ce cas, à faire voir que le motif qu’il a supposé n’a rien qui ne s’accorde avec la conduite habituelle de l’accusé. Prétend-il, par exemple, que c’est l’amour de l’argent ou celui des honneurs qui l’a fait agir ? Il le montrera constamment avare ou ambitieux, de manière à ce que le vice de l’âme paraisse inséparable de la cause du crime. S’il ne peut trouver un défaut en rap port avec le motif qu’il suppose, il faut qu’il en cherche un contraire. Dans l’impuissance de convaincre l’accusé d’avarice, il le montrera, s’il en a quelque moyen, corrupteur et perfide ; enfin il lui imprimera la souillure ou d’un ou de plusieurs vices, d’où l’on pourra conclure qu’il n’est pas étonnant qu’un homme dont la conduite est si coupable, soit l’auteur de ce nouveau forfait. Si l’adversaire jouit d’une haute réputation de sagesse et d’intégrité, l’accusateur dira que c’est aux actes et non pas à la renommée qu’il faut avoir égard ; que cet homme a jusque-là caché ses désordres, et qu’il sera démontré qu’il n’est point innocent. Le défenseur prouvera d’abord, s’il peut le faire, que la vie de son client est sans tache ;