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TUSCULANES, LIV. III.

la suite avec plus de netteté et d’étendue ; mais en ne m’écartant point des mêmes principes, qui ont je ne sais quoi de nerveux et de mâle. Car pour nos amis les Péripatéticiens, malgré leur éloquence, leur savoir et leur autorité, je ne puis goûter cette médiocrité de passions, qu’ils passent au sage. Un mal, pour être médiocre, ne laisse pas d’être un mal. Or notre but est que le sage n’en ait pas la plus légère atteinte. Car comme la santé du corps n’est point parfaite, quoiqu’il ne soit que médiocrement malade ; de même à quelque médiocrité que soient réduites les passions, s’il y en a dans l’âme, on ne peut pas dire qu’elle soit parfaitement saine. Pour bannir donc le chagrin, examinons ce qui le produit. Car de même que les médecins n’ont pas de peine à trouver le remède quand ils ont connu la cause du mal, aussi trouverons-nous à nous guérir de nos chagrins, quand nous en aurons découvert la source.

XI. Or cette source consiste uniquement dans l’opinion, qui produit non-seulement le chagrin, mais encore toutes les autres passions. On en compte quatre principales, qui se divisent en plusieurs branches. Mais parce que toute passion est un mouvement de l’âme qui n’écoute point la raison, ou qui en secoue le joug ; et que ce mouvement est excité par l’opinion du bien ou du mal, ces quatre passions se réduisent à deux classes. Dans l’une sont les deux passions qui naissent de l’idée du bien ; savoir le transport de joie, causé par la possession actuelle de quelque grand bien ; et la cupidité, qui est un désir immodéré de quelque grand bien qu’on espère. Dans l’autre classe, sont deux autres passions, causées par l’idée du mal ; je veux dire, la crainte et la tristesse. Car comme la crainte est l’opinion d’un grand mal qui nous menace, la tristesse est l’opinion d’un grand mal présent, et tel, que celui qui l’éprouve croie qu’il est juste et même nécessaire de s’affliger. Voulons-nous couler doucement et tranquillement nos jours, il nous faut lutter de toutes nos forces contre ces passions, que la folie suscite, comme des espèces de Furies, pour nous tourmenter. Une autre fois nous parlerons des autres. Délivrons-nous aujourd’hui de la tristesse, s’il est possible ; puisqu’aussi bien c’est le sujet que vous m’avez proposé, en soutenant que le chagrin trouve à pénétrer dans le cœur du sage. Pour moi je pense bien différemment. Je crois que c’est quelque chose d’affreux, qu’il faut éloigner de nous, et fuir, pour ainsi dire, à force de voiles et de rames.

XII. Que vous semble, en effet,

De cet auguste roi, qui parmi ses aïeux
Pouvait compter Tantale, et le maître des Dieux ?
Du fils de ce Pélops, qu’une heureuse entreprise
Rendit gendre et vainqueur du cruel roi de Pise ?


À quel point il est abattu découragé, lorsqu’il s’écrie :

Amis, éloignez-vous.
Fuyez un misérable,
L’objet infortuné d’un crime abominable.

dicenda sunt, et diffusius : scntenliis tamen utendum eorum potissimnm, qui maxime forli, et, ut ita dicam, virili utuntur ratione atque sententia. Nam Peripatetici, familiales noslri, quibus nihil est uberius, nibil eruditins, niliil gravius, mediocritates vel perturbationum, vel morborum animi mihi non sane probant. Omne enim malum, etiam médiocre, magntun est. Nos autem id agimus, ut id in sapiente nullum sit onmino. Nam ut corpus, eliamsi mediocriter agrum est, sanum non est : sic in animo ista mediocritas, caret sanilate. Itaque praclare noslri, ut alia milita, molestJam, solliciludinem, angorem, propter similitudinem corpornm agrorum, agritudinem nominaverunt. Hoc projiemodum verbo Graeci omnem animi perturbationem appellant : vocant enim TiâOoç, id est morbum, quicumque est motus in animo turbidus. Nos melius : aegris enim corporibus simillima est animi agriludo. At non similis agrotationis est libido, non immoderata lalitia, qua ; est voluptas animi elata, et gestiens. Jpse etiam metus non est morbi admodum similis, quaiiquam aegritudini est finitimus : sed pi oprie, ut agrotatio in corpore, sic a’giitudo in animo, nomen liabet non sejunctuin a dolore. Doloris igitur lmjus origo nobis explicandaest, id est, causa efficiens agritudinem in animo, tanqnam agrotationem in corpore. Nam ut medici causa morbi inventa, curationem esse invenlam putant : sic nos, causa agritudinis reperta, medendi facultatem reperiemus.

XI. Est igitur causa omnis in opinione, nec vero agritudinis solum, sed etiam reliquarum omnium perturbulionum : qua sunt génère quattuor, partibus plures. Nam «uni omnis perturbatio sit animi motus vel rationis expers, vel rationem aspernans, vel rationi non obediens : isque motus aut boni, aut mali opinione citetur : bifariam quattuor perlurbationes aqualiter distribuée sunt. Nam dure sunt ex opinione boni :quarum altéra, voluptas gestiens, id est, praeter modum elata latitia, opinione prasentis magni alicujus boni : altéra, vel cupiditas recte, vel libido dici polest, qua est immoderata appetitio opinati magni boni, rationi non obtempérons. Ergo bcec duo gênera, voluptas gestiens, et libido bonorum opinione turbantur : ut duo reliqua, metus et agritudo, malorum. Nam et metus opinioest magni mali impendentis : et agritudo est opinio magni mali prœsentis : et quidem recens opinio talis mali, ut in eo rectum videatur esse angi : id autem est, ut is, qui doleat, opoitereopinetur se dolere. Mis autem perlurbationibus, quas in vitam bominum stultitia quasi quasdam furias immittit, atque incitai, omnibus viribus, atque opibus repugnandum est, si volumus hoc, quod dalum est vita, tranquille, placideque traducere. Sed calera alias : nunc agriludinem, si possumus, depeilamus. Id enim sit propositum : quandoquidem eam tu videri libi in sapientem cadere dixisti. Quod ego nullo modo existimo. Tetra enim res est, misera, detestabilis, omni contentione, velis, ut ita dicam, remisque fugienda.

XII. Qualis enim tibi ille videtur

Tantalo prognatus, Pelope natus, qui quondam a socro
Œnomao rege Hippodamiam raptis nactus’st nuptiis ?


Jovis iste quidem pronepos. Tamne ergo abjectus, tamquo fractus ?

Nolite (inquit) hospites ad me adire. Illico istim,
Ne contagio mea bonis, umbrave obsit :