De plus, comme l'envie de découvrir la vérité lui est naturelle (ce qui se voit aisément lorsque, dans notre loisir, nous cherchons même à savoir les mystères célestes), de là vient que nous aimons tout ce qui est vrai, comme la fidélité, la simplicité, la constance ; et que nous haïssons tout ce qui est faux et qui nous trompe, comme la fraude, le parjure, la malignité, l'injustice. Enfin la raison a en elle-même je ne sais quelle force sublime et fière, plus faite pour commander que pour obéir, et qui regarde tous les accidents humains, non-seulement comme supportables, mais comme légers à supporter ; véritable puissance de l’âme, qui ne craint rien, ne cède à personne, et garde toujours la victoire. À ces trois genres de l'honnête, il faut en joindre un quatrième qui jouit de la même beauté et se rattache à tous les trois : l'ordre et la proportion, qu'on transporte des objets sensibles aux choses morales, et qui, naissant des trois premières vertus, règle de telle sorte les discours et les actions qu'on évite d'agir au hasard, qu'on ne nuit à personne ni de paroles ni autrement, et qu'on se garde bien de rien faire et de rien dire qui paraisse indigne d'un noble caractère.
CHAPITRE XV.
L'HONNÊTE D’APRÈS ÉPICURE.
Voilà précisément, Torquatus, ce que c'est que l'honnêteté, qui consiste dans les quatre vertus dont vous avez aussi parlé. Votre Épicure dit qu'il ne sait ce que c'est, ni ce que veulent dire ceux qui prennent l'honnêteté pour mesure du souverain bien. Il prétend que rapporter toutes choses à l'honnêteté, sans y joindre la volupté, c'est dire des paroles vides de sens (ce sont ses propres termes), et qu'il ne saurait comprendre