vieille robe que la cigale dépose pendant l’été, la membrane dont le veau naissant se débarrasse, et la dépouille du serpent, que nous voyons souvent flotter sur les buissons. Ces exemples te prouvent que la surface de tous les corps doit envoyer de pareilles mages, quoique plus subtiles. Car il est impossible d’expliquer pourquoi ces effigies grossières auraient plutôt lieu que celles dont la ténuité nous échappe, surtout la superficie de tous les corps étant garnie d’une multitude de corpuscules imperceptibles, qui peuvent se détacher sans perdre leur ordre et leur forme primitive, et s’élancer avec d’autant plus de rapidité qu’ils ont moins d’obstacles à vaincre, déliés comme ils sont et placés à la surface.
En effet, nous voyons un grand nombre de particules se détacher non-seulement de l’intérieur des corps, mais de leur surface même, comme les couleurs : c’est l’effet que produisent ces voiles jaunes, rouges et noirs, suspendus par des poutres aux colonnes de nos théâtres et flottant au gré de l’air dans leur vaste enceinte. L’éclat de ces voiles se réfléchit sur tous les spectateurs, la scène en est frappée : les sénateurs, les dames, les statues des dieux, sont teints d’une lumière mobile ; et cet agréable reflet a d’autant plus de charme pour les yeux que le théâtre est plus exactement fermé et laisse moins d’accès au jour. Or, si les couleurs de ces toiles sont détachées de leur superficie, tous les corps ne doivent-ils pas envoyer aussi des effigies délices, puisque ces deux espèces d’émanations viennent de la surface ? Nous avons donc découvert la trace de ces simulacres qui volent dans l’air avec des contours si déliés, que, pris séparément, ils échappent à l’œil.
Apprends maintenant à quel point ces images sont subtiles, puisque leurs principes sont infiniment plus imperceptibles et plus déliés que les corpuscules qui commencent à échapper à l’œil. Mais, pour t’en convaincre encore davantage, apprends en peu de mots quelle est la ténuité des principes de la matière.
D’abord il y a des animalcules si petits, que le tiers de leur grosseur est absolument invisible. Que penserons-nous donc de leurs intestins, de leur cœur, de leurs yeux, de leurs membres, de leurs articulations ? Quelle finesse ! Et si l’on songe aux principes dont il faut que leurs esprits et